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Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/146

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et tous ensemble sont la maison qui se protège contre l’intempérie. J’ai bouché d’abord le toit avec des ramures comme le sauvage des campements et à présent je m’initie à l’art de ceux qui se bâtirent une demeure durable. Je crois entendre une voix qui me dit : « Tu portes en toi la forme de ta maison et chacun des doigts de ta main est fait à la mesure de l’œuvre qui sortira de toi. » Les étages de la ruche se haussent, la fourmilière s’approfondit et personne n’apprit à l’abeille à former ses cellules ni à la fourmi à creuser ses galeries.

Il pleut, il vente et là-bas vient l’hiver. Je vis en moi profondément comme dans un puits. Je vis ma substance et mon rêve. Je suis l’ouvrier halluciné du bois. N’est-ce pas là quelqu’un de ma race qui arrive par les chemins trempés et regarde au dedans des chambres ? Ombre ! Ombre ! Voici Ève pelant les cèpes frais ou tournant dans le vaisseau de glaise la bouillie de châtaignes. Et devant l’établi un homme roux et velu rabote et martelle. Passe ton chemin, un doigt aux