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Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/378

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d’amour comme des guirlandes de myrtes verts. Elle dansait comme une petite vierge sur les pelouses au son de mes pipeaux et elle avait le visage clair des jours jeunes de ma joie. Il n’y eut qu’un peu plus de lumière dans ses yeux, une lumière plus haute comme à mesure que le midi ruisselle. Il n’y eut que des formes plus onctueuses autour de la fine épine de sa vie. Deux fois le jour, à l’aube et au crépuscule, nous partions nous baigner au ruisseau ; de la lumière s’égouttait de ses hanches ; toute l’eau était rose du frisson de sa chair. Mais moi, avec ma peau velue et rousse sous le ciel matinal, j’étais encore la sombre nuit attardée quand elle, dans le soir des arbres, déjà s’annonçait la belle aurore venue à petits pas. Le vent ensuite séchait notre nudité fraîche sous les arbres.

Nos corps étaient légers d’éternité comme la source et le bois. Et Ève ne cessait pas d’être la petite femme enfant, mobile et spontanée, la divine créature originelle qui aimait et enfantait comme la terre. La fraise des bois se fanait et elle renaissait aux pointes de sa