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Page:Lemonnier - Adam et Ève, 1899.pdf/384

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fine et si vibrante sensibilité ! Nous regardions les nuages se former de nos pensées. Nous palpitions, le sein gonflé, aux clartés des étoiles comme si par ces clartés, les âmes d’une humanité délivrée, plus près des secrets que la nôtre, nous regardaient. Un haut et léger ciel d’avril correspondait à de si intimes et heureux mouvements en nous ! Les lourds nimbus dormants de l’été passaient comme des navires d’argent aux voiles silencieuses portant la joie gonflée de notre vie. De tendres exaltations, d’aimables langueurs montaient de nous vers les jeunes lunes du printemps aux nuées blondes sur lesquelles se joue l’ombre des premières feuilles. Les nuits d’automne, pleurant de douces lueurs filtrées de veilleuses, nous versaient la sympathie pour des maux fraternels et qui nous étaient ignorés. Il glissait à la tombée du jour, par dessus la terre givrée de frimas, de si frileux frissons roses au pâle émail pers du ciel ! Des nuances éteintes et malades nous donnaient le goût de nous replier sur nous-mêmes, voluptueux et transis. Les hê-