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Page:Lemonnier - L'Hallali, sd.pdf/124

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coups de sabots dans la voiture, il parut se rappeler qu’il devait passer à l’étude de son notaire dans la matinée.

— Vous savez bien, le bois du Grand-Cerf, de l’autre côté des anciens étangs, le pharmacien Créquion l’avait acheté à m’sieu le baron, votre grand-père, et voilà, c’est moi qui à mon tour l’achète au fils Créquion le filateur, qui s’est mis dans de mauvaises affaires.

Lechat, dans sa malice, sembla toucher là volontairement à la grande plaie de la maison, ce patrimoine arraché à poignées comme la laine du dos d’un mouton. Il pirouetta sur ses talons, secoua la lourde patte de Jean-Norbert, avança vers les dames sa main gantée de peau de chien, cérémonieux, le bras arqué et le coude haut, comme un gentleman. Barbe s’était levée. Sybille, la sentant pleine de considération pour ce drôle qui lui faisait si impudemment renifler leur argent, la prit en pitié. Elle se laissa toucher les doigts, restée assise, la tête droite. Comme il levait ses yeux ronds et rusés, petit à côté de sa grande taille de femme, il lui vit sous la barre du sourcil l’œil d’oiseau de proie des Quevauquant.

« Pas commode, la jument ! » pensa-t-il. Mais son assurance d’homme riche n’en fut pas démontée.