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l’hallali

que pour le salut. Après quoi, on dînait : le potage, deux plats, un fruit ou une confiture, des gâteaux. C’était un délice pour Barbe : tout lui mettait la larme à l’œil et elle ne se tenait pas de continuellement sourire, d’une bouche humide et ravie. Sa vieille âme candide s’émerveillait pour un plat, pour un chemin de table, pour un geste.

— Mon Dieu ! Laïde ! Il n’y a que vous pour avoir une maison si bien tenue. On ne mange nulle part ailleurs comme ici. Et puis vous êtes belle ! Vous avez toujours été la plus belle de la famille ! Et vos mains ! Quand, à la procession, vous portiez une des bannières, c’étaient comme des petites fleurs ! Ah ! Laïde, et votre taille ! Jamais, on n’en avait vu de plus fine. On était fière d’être une Lanquesaing à côté de vous. Ah ! que je suis heureuse ! Il me semble que j’ai déjà l’âme en paradis.

Laïde s’arrêtait.

— Vous n’y pensez pas, ma sœur Barbe. Il est défendu de mêler aux choses de la terre, la pensée de ce qui est là-haut.

— Oh ! pardon, je ne croyais pas m’être mise en faute. Je vous en demande pardon, Laïde, j’en demande pardon au bon Dieu. Mais c’est que vraiment on est si bien chez vous ! Tenez, j’en pleure comme une bête. Sybille, où est mon mou-