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Page:Lemonnier - L'Hallali, sd.pdf/269

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LXX’HALLALI

Il s’aperçut au jûtement de ses bottines, petit à petit trempées à la mouillure des herbes, qu’elle était chaussée comme une servante. Il se risqua :

— Une belle fille comme vous, ça n’est pas fait pour moisir à la maison.

— C’est vrai, répondit-elle d’une voix sourde, j’étais plutôt faite pour la vie que menèrent mes aieules, toujours à cheval, par monts et par vaux.

Il souffla dans ses joues, très rouge, et puis l’air indifférent :

— Bah ! il ne tiendrait qu’à vous.

Elle haussa les épaules et le regardant droit dans les yeux :

— Prenez garde, vous allez dire l’éternelle bêtise qu’on dit à toutes les filles pauvres. Un mariage, pas vrai ?

Il se vit acculé, comme si elle-même tout à coup le contraignait à parler.

— Mais oui, pourquoi pas ? Tenez, mamzelle Sybille, je peux bien vous dire. J’suis un peu de la famille, puisque ma défunte femme était votre parente par les Bœuf.

Les yeux droit devant lui, il ne vit pas qu’elle fronçait les sourcils.

— Ben, il me faudrait là une petite femme comme vous. Vous auriez des chevaux, des voitures, des toilettes, tout ce que vous voudriez. L’hiver à la ville, l’été à la campagne…