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Page:Lemonnier - L'Hallali, sd.pdf/62

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l’hallali

d’un coup de sabot les fumerons pendant que Jumasse à la pointe du couteau dépiautait les deux bestioles. Sybille, dans l’ouvroir, à la lampe, reprisait des bas et rapiéçait des vêtements. Comme, le matin, le piéton avait annoncé que le marchand de porcs passerait bientôt, Barbe se tirait les cartes. Le marchand paierait-il bon prix ? On aurait, dans ce cas, la chance de se remonter en linge et en flanelle. L’autre hiver, pour un froid que le père, mal vêtu, avait pris à travailler sous la brouée et qui s’était greffé sur son asthme, il avait fallu faire appeler le médecin des bêtes, qui était aussi le médecin des gens.

— C’est d’argent qu’il retourne, fit-elle.

Sybille alors réclama des jupons pour elle. On achèterait des camisoles pour Michel. Barbe eût aimé une douillette pour son lit. Personne ne songea à la pauvre Jaja habillée comme une petite pauvre.

Jean-Norbert, étant entré sur le moment et les entendant calculer ce qu’il leur faudrait d’argent pour leurs emplettes, gronda. Ah bien ! s’il fallait encore payer cela sur le produit des bêtes ! On ne finissait pas de dépenser ; l’argent leur coulait des doigts. Et voici qu’à la Saint-Martin, échéait la rente de l’hypothèque que Monsieur avait souscrite à Bidart, le marchand de bestiaux, il y avait bientôt quinze ans.