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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/100

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peu fait sa rhétorique ne peut faillir à l’obligation d’avoir produit une élève des Grâces, et son premier devoir est de faire apprendre à sa fille le piano, fût-elle comme Agathe, insensible à la mélodie et à la mesure. Dame ! il faut être logique : l’oisiveté du corps et de l’esprit complète si bien une dot de dix mille francs ! Vois-tu, depuis que la mort de notre père m’a désappris le métier d’enfant, je regarde les choses et je deviens sérieux. Les filles bien élevées sont des créations stupides. Je n’en connais qu’une seule, dit-il en l’embrassant, une seule qui ait du cœur et de la raison ; il est vrai qu’on lui a permis d’en avoir.

— Penses-tu, dit Cécile, devinant que ce dénigrement d’une classe de jeunes filles tournait secrètement à l’apologie d’une autre, penses-tu que le même esprit ne règne pas partout, et que les filles du peuple, à l’exemple des autres, n’aient pas leurs prétentions et leur frivolité ?

— Moins, beaucoup moins ; elles ont plus de naturel, et leurs défauts même peuvent être adorables, parce qu’ils sont naïfs. En outre, l’habitude du travail, l’obligation de compter sur elles-mêmes, les fortifient ; elles ont, je le veux bien, quelque frivolité apparente, due à leur âge et à leur éducation ; mais ces femmes-là seront des épouses sérieuses, des mères dévouées ; elles n’exigeront pas de plaisirs coûteux, n’accueilleront point de rêves coupables ; elles rempliront simplement et honnêtement les devoirs auxquels elles ont été habituées depuis l’enfance.

— Le sujet te passionne au point que nous dépas-