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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/116

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est tout comme la maîtresse des Saulées, et qui veut marier sa nièce. Alors donc M. de Pontvigail envoya Louis au collège, où jamais auparavant il ne l’avait voulu mettre ; mais c’était pour l’y tenir enfermé sévèrement. Je m’imagine pourtant que Louis, s’il avait su sa maîtresse en peine comme elle l’était, aurait bien trouvé le moyen d’en sortir ; mais il ne savait rien, et, quand il revint, dix mois après, chez son père, il ne la retrouva plus.

On lui fit cent contes. Un jour pourtant il apprit la vérité :

Quand on avait connu la grossesse de la fille, car elle ne pouvait plus la cacher, on l’avait chassée des Saulées, et cette malheureuse, n’osant retourner chez ses parents, qui étaient des gens comme il faut et l’auraient bien mal accueillie, s’en alla de son pied, son petit gage en poche, à la ville, où seule, dans une grande misère, elle mit au monde son enfant. Bientôt après, l’argent lui manqua tout à fait ; et alors elle partit, l’enfant dans ses bras, mal remise encore. On ne sait trop par où elle passa, ni ce qu’elle devint pendant quelques jours, ni ce qu’elle pensait de faire. Toujours est-il qu’un jour on la trouva morte dans une grange, avec l’enfant auprès d’elle, qui n’avait aussi presque plus de vie et rendit le dernier soupir quelques heures après. — Voyez-vous, ajouta la fermière en baissant la voix, quand Louis apprit cela, il l’a dit lui-même, une telle rage le saisit, qu’il sauta sur son fusil pour tuer son père. Heureusement, sa nourrice, qui était ma mère, le rencontra en ce moment, l’amena ici et l’empêcha de faire un mauvais coup, ou contre son