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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/135

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naïve et plus enfantine, est le plus facilement captivée par l’éclat des dehors.

Entre le sauvage qui vend son frère pour des verroteries et des paillettes, le populaire qui respecte et envie la richesse, l’enfant qui tend les mains vers le jouet doré, la différence est légère. Les uns comme les autres sont des enfants dans l’humanité, qui jusqu’ici compte peu d’adultes.

L’objet constant des conversations de Rose, tandis qu’elle reprisait ou repassait les cols de Cécile, était la toilette ; la toilette et Paris, le monde et ses usages, où, si étroits soient-ils, la vanité prend ses aises si largement. Mlle Marlotte, s’apercevant que Rose prenait en cachette les patrons de ses fichus, les lui offrit, et dès lors la vanité de l’ouvrière n’eut plus de réserves. Tous ses rêves tendirent à rapprocher son costume le plus possible de celui des Parisiennes, moins la coiffure, que le préjugé populaire, très-vif dans sa famille même, lui défendait de changer.

Elle veillait tous les soirs pour se confectionner quelque nouvelle parure, et rien n’égalait l’éclat de ses yeux à l’idée de l’effet qu’elle devait produire avec tel ou tel chiffon. Toutes les économies de Rose passaient en achats de dentelles et de mousseline, et elle se donna pour le dimanche des bottines à talons, qui la gênaient fort, mais ne la rendaient que plus fière.

Elle prenait de petits airs à mourir de rire en parlant des dames de Loubans, qu’elle traitait à peine en égales ; et quand elle avait jugé un homme à sa