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Page:Leo - L Ideal au village.pdf/167

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« Mais tu n’es pas un David, ma petite sœur ?

— Et ce n’est pas non plus un Saül, répliqua-t-elle, mais un être doué d’immenses besoins d’idéal et d’harmonie qui n’ont jamais été satisfaits. Son irritation ne provient que d’une sensibilité exaltée à l’excès par la souffrance.

— Ah çà ! d’où le connais-tu si bien ?

— Quand je fais de la musique, répondit-elle en riant, je suis la princesse Fine-Oreille, j’entends pousser les pensées. »

Lucien resta un moment silencieux, et Cécile reportait ses mains sur le piano, quand il les retint prisonnières.

« Toutes les petites localités sont des foyers de commérages, dit-il. Je n’aime pas la présence de M. de Pontvigail dans ce jardin tous les soirs. Cela pourrait à la longue te compromettre.

M. de Pontvigail ! s’écria Cécile.

— Il n’est pas séduisant, je te l’accorde ; mais un homme jeune encore.

— Allons donc ! reprit-elle, c’est impossible. Tant de prudence, d’ailleurs, serait une cruauté.

— Tu es sûre qu’il est là ? demanda Lucien.

— Je le crois ; oui, il doit attendre encore. Notre concert dure au moins une heure chaque soir.

— Eh bien, il vaut mieux qu’il entre ici ; ce sera plus franc. Continue, je vais le chercher.

— Mon Dieu ! s’écria Cécile d’un ton désolé, tu vas m’effaroucher mon pauvre public ; il est si sauvage !

— Non, sois tranquille ; nous l’engagerons à en-