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Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/216

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manquer de biscuit. Notre nourriture fut réduite a une demi-ration de riz, un peu de choux sauvages et quelques navets pour toute une compagnie. Au mois de septembre également, un Te Deum fut chanté dans la cathédrale de Pékin, avec accompagnement de musique militaire, pour fêter la délivrance des légations et de la mission. Les généraux et M. Pichon y assistaient. Notre ministre paraissait avoir beaucoup souffert des fatigues et du surmenage qu’il s’était imposés. Les militaires le saluaient respectueusement, car chacun avait reconnu en lui un homme énergique, courageux et plein de cœur. Mgr Favier recevait tout le monde à la porte de l’église avec beaucoup d’affabilité. Aux soldats, il tapait familièrement sur l’épaule avec un bon sourire. Au hasard, il leur distribuait quelques cigares, mais en cachette, car il n’en avait pas assez pour tous et ne voulait pas faire de jaloux.

En vue de l’hiver, qu’on savait très rigoureux, une fouille fut ordonnée dans les maisons abandonnées afin d’y chercher des couvertures. Il fut expressément défendu de toucher à d’autres objets, ainsi que de pénétrer dans les maisons habitées. Chaque corvée était accompagnée d’un officier qui en était personnellement responsable.

Vers le milieu de septembre, on demanda aux chefs de chaque unité de signaler, pour les rapatrier, les hommes qui ne paraissaient pas en état de supporter l’hiver en Chine. Un assez grand nombre se présentèrent.

Le palais impérial était gardé par les nations alliées avec une jalousie et une défiance réciproques dont les Chinois riaient à leurs dépens. Chacune y avait placé un poste et tous ces postes avaient la consigne de s’en interdire mutuellement l’accès. Un jour où j’y étais en sentinelle, une dame anglaise se disant la femme d’un consul en Chine, se présenta à moi et voulut à toute force pénétrer dans l’enceinte. — Madame, lui dis-je très poliment, je suis précisément ici pour vous