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Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/58

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escorte à Géryville, par le même chemin que nous avions pris la première fois. Mais au retour nous suivîmes la route d'El-Kreider.

A Alfaville, on nous fit voir une vingtaine de moutons égorgés par des hyènes. Ces moutons appartenaient à un Français. Il nous apprit que les hyènes lui avaient déjà tué une centaine de moutons par la faute de l'Arabe chargé de les surveiller. L'hyène, qui ne voit pas, ne chasse pas seule ; elle est toujours précédée du chacal, qui lui cherche des victimes : moutons ou gazelles. L'hyène les égorge et boit le sang ; le chacal, lui, ne dévore que des cadavres. Souvent, il en déterre pour les manger.

Le colon victime de l'accident nous offrit généreusement quelques moutons, mais je le priai de les garder pour la noce de sa fille.

A El-Kreider, nous fîmes un séjour de près de vingt-quatre heures. C'est un petit village qui ressemble aux autres du Sud-Oranais, exception faite du jardin merveilleux construit par les soldats du bataillon d'Afrique. Ses allées sont entretenues avec soin ; au centre d'une vaste pelouse se trouve un lac, d'où jaillit une eau claire comme du cristal, mais malheureusement non potable.

À ce propos, je consacrerai quelques lignes à nos bataillons d'Afrique. Leur nom véritable est « infanterie légère d'Afrique ». En France ils sont plutôt connus sous le nom de « Bat-d'Aff ». Sur ce qui s'y passe, de même que pour les compagnies de discipline, on a une tendance à exagérer. La vie journalière n'y diffère pas beaucoup de celle des autres régiments. Bien entendu, je ne parle que de ceux où la discipline règne, et non pas de ceux où les hommes se révoltent contre les ordres et sont en conséquence presque toujours en prison. Naturellement, ici comme là-bas, ce n'est pas précisément la crème qu'on envoie et les gradés chargés d'assurer le service éprouvent parfois de grandes difficultés.