Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/135

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trop triste, trop âpre de ton, pour un recueil juvénile. C’est un assez long récit fantastique, satirique, à prétentions philosophiques, que celui des aventures du grand Sidoine et du petit Médéric, se dirigeant vers le royaume des Heureux, où règne la fée Primevère. Une vague imitation de Candide et de Gulliver se retrouve en ce récit, plus enfantin que moraliste. C’est ce papier-là que Zola aurait dû remettre à M. Hachette, pour son Journal de la Jeunesse. Les Contes à Ninon ont été réédités, en 1906, chez Fasquelle, sans grand succès. Ils sont intéressants à parcourir, comme document biographique, comme point de comparaison. Après cette publication, Zola débuta dans la presse quotidienne par quelques articles qu’accepta le Petit Journal, et aussi par des articles de critique littéraire et de critique d’art, qui furent, par la suite, réunis en volume, sous ce titre : Mes Haines qu’ils ne justifiaient guère. Le livre était plus tapageur que réellement haineux. Il attira l’attention du public spécial ; il irrita nombre de peintres et de sculpteurs, notamment par l’éloge de Manet, ce grand artiste était alors nié et bafoué, et par l’apologie de l’école réaliste ou impressionniste. Le terme n’était pas encore usité, ni même inventé, mais l’impressionnisme existait, avec l’auteur d'Argenteuil et du Bord de l’eau, avec Pissarro, Sisley, Renoir, Berthe Morisot, Degas, Caillebotte, débutants et conspués, et avec Cézanne, qui devait, toute sa vie, demeurer aussi impressionniste et aussi ignoré qu’aux heures de noviciat. L’amitié louangeuse de Zola n’est pas parvenue à l’accréditer définitivement. Cézanne est un artiste d’un talent original et puissant, et il semble avoir été surtout poursuivi par une injuste malchance.