Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/384

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discutées par le capitaine, Zola opposa ses documents, ses renseignements, sa sincérité : J’espère, écrivit-il, qu’on me fait au moins l’honneur de croire que, pour tous les faits militaires, je me suis adressé aux sources. Après la défaite, chaque chef de corps, voulant s’innocenter, a publié ou fait publier une relation détaillée de ses opérations. Nous avons eu ainsi les livres des généraux Ducrot, Wimpffen, Lebrun, et, si le général Douai s’est abstenu, c’est qu’un de ses aides de camp, le prince Bibesco, a écrit sur les mouvements du 7e corps un ouvrage extrêmement remarquable, dont je me suis beaucoup servi. Ayant ainsi justifié ses affirmations d’ordre stratégique, et cité ses auteurs, Zola, animé d’une grande et légitime indignation, proteste contre la naïveté avec laquelle, dans la presse française, on a paru accueillir les hypocrites éloges d’un officier allemand, brûleur de maisons et tueur de femmes, à Bazeilles. Il faudrait vraiment être bien nigaud pour accepter, dit alors Zola, de tels éloges, derrière lesquels se cache un soufflet si insultant à la patrie française ! Eh bien ! non, il n’est pas vrai que tout le monde ait fait son devoir. L’histoire a ouvert son enquête, la vérité maintenant est connue et doit se dire. Oui, il y a eu des soldats qui, dans l’affolement de la défaite, ont jeté leurs armes ; oui, nos généraux, si braves qu’ils fussent, se sont presque tous montrés des ignorants et des incapables ; oui, nos régiments ont crié la faim, se sont toujours battus un contre trois, ont été menés à la bataille comme on mène des troupeaux à la boucherie ; oui, la campagne a été une immense faute, dont la responsabilité retombe sur la nation entière, et il faut la considérer aujourd’hui comme une terrible épreuve nécessaire, que la nation a traversée, dans le sang et dans les larmes, pour se régénérer. Voilà ce qu’il faut dire, voilà ce qui est un véritable soulagement pour la France. C’est le cri même du patriotisme intelligent et conscient de lui-même. Nous avons besoin que la faute soit avouée et payée, que la confession soit faite, pour