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Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/148

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— Peut-être es-tu déjà fatiguée de tes engagements, répondit-il froidement. Je reconnais que je suis un mari trop ennuyeux, trop dévoué, trop affectueux : eh ! bien, je vais tâcher de me réformer.

Un long silence suivit ces paroles ; et, après avoir fait asseoir sa femme, le militaire la laissa sans lui dire un mot de plus.

Quelques minutes après, elle le vit près d’une gracieuse brunette, lui parlant à voix basse avec toute l’attention qu’il avait coutume de lui accorder à elle-même. Un sentiment de malaise inexprimable s’empara d’elle à cette vue ; mais elle fut assez forte pour le combattre résolument et accepter le premier danseur qui se présenta. Pendant la danse, ses yeux se dirigèrent involontairement vers l’endroit où se trouvait Audley. Il était à la même place où elle l’avait aperçu d’abord, penché vers sa jolie compagne, jouant avec une fleur qu’elle lui avait donnée de son bouquet, et augmentant, par ses chuchotements et ses flatteries, la rougeur qui couvrait les joues de la jeune fille. Alors une douloureuse angoisse vint frapper Antoinette au cœur ; mais, trop fière pour se trahir, elle accepta le supplice d’une autre danse avec un monsieur ennuyeux. Ce cotillon fut bientôt terminé, et les notes mesurées d’un menuet, — si différent de la rapide polka, de la valse et du galop de notre époque, — se faisaient à peine entendre, que Sternfield était déjà en place avec sa même partenaire. Antoinette souffrit tout cela