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Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/232

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XXIV.


Antoinette trouva les deux jours suivants singulièrement tranquilles, après la terrible agitation par laquelle elle avait passé. M. Cazeau, l’ami de M. d’Aulnay dont nous avons déjà parlé, était un homme aimable et possédait cette délicatesse de manières et cette franche gaieté qui caractérisaient si bien nos pères. Patriote sincère, il déplorait les malheurs de son pays, et Antoinette éprouvait en l’écoutant une salutaire distraction à ses tristes pensées, car l’expression de ses regrets n’était pas accompagnée de ces violentes diatribes que son père lançait ordinairement à l’adresse des conquérants.

— Eh ! bien, mademoiselle Antoinette, — dit M. Cazeau, le troisième soir de son séjour chez M. d’Aulnay, au moment où, après une charmante conversation chacun se préparait à se retirer — lorsque je verrai M. de Mirecourt, ce qui sera bientôt, je ne manquerai pas de lui dire combien les rapports qu’on lui a faits vous ont mal représentée ainsi que madame d’Aulnay. On m’avait dit que vous étiez environnées d’un cercle d’habits rouges, plongées dans la vie fashionable la plus gaie, et tout-à-fait inaccessibles au commun des mortels comme nous. Or, voilà trois grands jours que je passe ici, et je vous ai vues constamment occupées