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Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/53

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VI.


Madame d’Aulnay et sa jolie cousine étaient donc lancées dans cette vie du grand monde où elles étaient si bien faites pour briller, et l’entrée dans les beaux salons de Lucille était regardée comme une faveur signalée. Les nouveaux amis de la jeune femme étaient très assidus dans leurs visites.

Parmi ces derniers, le colonel Evelyn venait de temps à autre ; mais, à mesure qu’il devenait plus intime, aucun changement ne se faisait remarquer dans sa conduite grave et tranquille : il ne se départit en rien de sa remarquable réserve. Jamais il ne dansait, à peine adressait-il quelques mots à Antoinette ou à ses jeunes et charmantes rivales ; quoique poli et courtois, il ne donnait jamais un compliment ; jamais sa bouche austère ne se prêtait à ces galanteries banales qui obtiennent dans les salons un droit de cité égal à celui qu’y ont les propos sur la température. Évidemment, le major Sternfield avait raison : cet homme si réservé, inaccessible, n’avait qu’une bien faible confiance et une foi bien légère dans la femme.

Cependant, Audley Sternfield avait fait d’amples apologies de l’indifférence de son colonel, et peu de