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Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/382

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ÉPILOGUE

Balaoo fut sauvé le jour qu’il revit les lieux où il avait aperçu sa mère pour la dernière fois. C’était à trois jours de marche de Batavia, à quelques centaines de mètres des mangliers millénaires qui enfoncent leurs racines jusqu’au cœur même de la terre. Il reconnut les dispositions du carrefour et les voûtes épaisses qui distribuaient la même ombre et la même lumière, car il faut des certaines de siècles pour modifier ces paysages créés par les dernières perturbations du monde et l’élan de la première sève universelle.

Il dit : C’est là ; et il arrêta ses compagnons.

— C’est là ! C’est là, ma forêt de Bandang !… Voilà les bois de mon enfance !… Là, je jouais avec ma mère et mon petit frère et ma petite sœur. Moi, j’étais déjà vigoureux et fort, mais encore un baby, cinq ou six ans à peine… mon petit frère et ma petite sœur commençaient à peine à marcher ; moi, je gambadais en vérité et j’appelais mon jeune frère et ma petite sœur par mes gestes et mes cris et je les engageais à venir partager mes ébats.

« Le petit, pour me suivre, essayait quelques gambades, mais il faisait de vains efforts ! Oh ! je le vois encore trembler sur ses petites jambes qui le supportaient à peine ; il tombait, et ma petite sœur aussi tombait… et notre mère les relevait tendrement et les encourageait de la voix et du geste.