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Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/284

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Mécontents de leur défaite, les gars de Torre-les-Tourettes revinrent l’année suivante et réussirent à enlever le « mai » qu’ils plantèrent devant leur église. Voyant ce coup hardi, les plus courageux de la Fourca, Toton Robin, déjà nommé, Jérôme Brocard, Pierre Antoine dit « Cauva », son frère Barthélemy, les deux Raybaut et notre Titin qui était alors un bambin, suivis de quasi toute la population valide de la Fourca, hommes, femmes, enfants, et la mère Bibi en queue avec ses deux chèvres, s’en furent à Torre-les-Tourettes, dès le dimanche suivant, après vêpres, avec leurs fifres et tambours en tête et là, à la vue de ceux de Torre qui n’osèrent aucune résistance, enlevèrent l’arbre du Mai et le rapportèrent en triomphe à leur Sainte-Hélène où ils « virèrent le brandi », c’est-à-dire chantèrent et dansèrent autour de leur trophée.

L’affaire ne faisait que commencer, il y avait alors à la Fourca trois jeunes filles appelées béates qui n’avaient pas d’amants, savoir : Thérésia, Félicita et Madalon.

L’année qui suivit le scandale que nous avons dit, elles s’en laissèrent conter, par on ne sait quel sortilège du diable, par les gars de Torre-les-Tourettes, où elles émigrèrent bientôt, pour le déshonneur de la Fourca.

L’enlèvement des Sabines ne fit pas plus de bruit au temps jadis.

Ceux de la Fourca jurèrent qu’ils vengeraient comme il convenait un tel affront. Le serment en fut prêté en grande pompe devant Sainte-Hélène. Cinq ans passèrent pendant lesquels il n’y eut point de méchants tours que les garçons de l’un et de l’autre pays ne se