Aller au contenu

Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le prince, de son côté, ne touchait aux mets que du bout des dents. Il avait inutilement cherché le regard de Thélise et celui de Caroline, mais pour l’une comme pour l’autre, il ne semblait plus exister.

Antoinette ne lui avait pas encore adressé la parole et il ne redoutait rien tant, du reste, que cette échéance.

Antoinette, elle, s’amusait énormément, mais comme elle n’en laissait rien paraître, la séance continuait, lugubre et maussade.

Tout à coup, on entendit la voix claironnante de la terrible enfant qui, du fond de l’assiette sur laquelle elle était penchée, s’écriait :

— Ça doit être bien rigolo de s’appeler Mme Hippothadée !…

Il n’y eut, pour éclater de rire de cette réflexion saugrenue, que la vieille domestique qui se fit incontinent jeter à la porte par M. Hyacinthe, lequel présenta immédiatement ses excuses à son hôte pour l’espièglerie indécente de sa filleule et la stupidité notoire de la femme de service.

Après quoi, il profita immédiatement de l’incident pour le vider et qu’il n’en fût plus question.

— Antoinette, fit-il, tu n’es qu’une petite sotte !

— Oui parrain !

— Et tu n’es pas digne des grands honneurs qui t’attendent !

— Quels honneurs, parrain ?

— Le prince Hippothadée, ici présent, m’a causé l’orgueilleuse surprise de me demander ta main !…