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Page:Leroux - Mister Flow.djvu/227

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vagabond depuis que je me suis débarrassé de ma livrée… Aussi, je ne me vois pas à Deauville ! Mais je n’en suis pas loin, et je vais pouvoir avertir Helena…

Je ne me risque pas sur la côte. Mais, à deux kilomètres de Luc-sur-Mer, je loue, pour quarante-huit heures, payée d’avance, une mansarde dans une auberge de la Délivrande. Je n’en sors pas pendant deux jours, vautré sur mon grabat avec une miche de pain, un pot de cidre et un morceau de fromage sur la table.

Je n’ai pas écrit à Helena. J’ai mangé et j’ai dormi. Pourquoi n’ai-je pas écrit à Helena ? De me savoir si près d’elle, cependant, je sens le retour de mon désir vers cette belle, cette diabolique, cette unique maîtresse ! Elle m’a procuré des heures incomparables. La déchéance où je suis tombé (momentanément, je crois) est impuissante à me les faire oublier. Et, sincèrement, je ne regrette rien ! Elle m’a fait faire un métier de sacripant, mais je le faisais à ses côtés. Elle a fait de moi un homme ! un homme qui se bat dans la vie, qui se défend, qui attaque. J’ai beau faire le tour de mes exploits, ce n’est ni le souvenir de l’hôtel Boieldieu, ni celui de la cité Rougemont qui me troublent. Je n’arrive à m’attendrir que sur ma dernière victime, la pauvre Trompette, qui m’aimait si follement. Et encore si mon cœur s’émeut, ce n’est pas d’avoir payé par le vol de ses petites économies le plus rare dévouement et les plus tendres caresses, mais de l’avoir laissée, elle, dans les larmes. Celle-là, j’en suis sûr, n’est pas