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Page:Leroux - Rouletabille chez Krupp, 1944.djvu/37

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MADAME FULBER

Tout le monde se leva à l’entrée de Mme Fulber.

Le « Président » lui adressa quelques bonnes paroles réconfortantes, lui confirmant la nouvelle qui lui avait été déjà communiquée que son mari et sa fille étaient prisonniers en Allemagne, mais en bonne santé, ne courant apparemment aucun danger et qu’il fallait, dès lors, ne pas désespérer de les voir bientôt sortir de cette affreuse aventure.

Après quoi, Mme Fulber fut priée de s’asseoir.

Elle s’assit en remuant doucement la tête. C’était cette bonne vieille dame que « Rouletabille » avait remarquée dans le vestibule. Elle avait un visage flétri et douloureux, et toute la tristesse qui était répandue en elle semblait aussi vieille qu’elle.

« Pourriez-vous, madame, demanda le « Président », nous donner quelques détails sur les conditions dans lesquelles s’est produit l’enlèvement de votre mari et de votre fille ?

— J’ai déjà répondu à cette question, fit la vieille dame, d’une voix douce comme celle d’une petite fille : je n’ai rien vu ni rien entendu. Qu’ajouterai-je de plus ? J’ai été ligotée, bâillonnée dans l’obscurité, et je me suis évanouie de terreur.

— Pendant la soirée, le Polonais est-il resté tout le temps avec vous ? Est-il rentré avec vous ? S’est-il couché à la même heure que vous ?

— J’ai tout lieu de le croire, monsieur !… Il nous a souhaité une bonne nuit à tous et il s’est enfermé dans sa chambre.

— Vous ne vous doutiez de rien ?… Vous vous êtes tous endormis pleins d’espoir…

— Oh ! pleins d’espoir ! interrompit la vieille… en ce qui me concerne, je n’en ai plus depuis longtemps !… Mon mari n’a jamais été heureux en rien ! Tout ce qu’il a entrepris s’est toujours tourné contre lui, contre nous ! Cela devait finir ainsi ! Ses inventions nous ont ruinés et lui ont valu des tracas sans nombre. La dot de ma fille