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Page:Leroux - Rouletabille chez Krupp, 1944.djvu/42

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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

« La plupart de ces prisonniers sont simplement réquisitionnés pour le service de la voirie, mais il en est quelques centaines que l’on emmène du camp le matin pour les faire travailler aux usines et que l’on ramène le soir.

« On n’exige pas d’eux qu’ils travaillent aux munitions… C’est une erreur de croire, comme je l’ai cru longtemps moi-même, que les usines d’Essen ne fabriquent que des canons, des obus, des cuirassés et tous autres engins de guerre ; en effet, une partie assez grande même des ateliers produit des articles des genres les plus variés, destinés à être échangés contre des victuailles ou des objets de première nécessité dans les pays neutres.

« J’ai vu moi-même, entassés sur les quais de la Ruhr, à Duisburg, des produits fabriqués à Essen, des machines et des assemblages mécaniques qui allaient partir pour la Suède, laquelle expédie en échange de l’huile, du poisson, du papier et du bois.

« Les usines Krupp envoient en Hollande des couteaux, des ciseaux, des machines à coudre, des ustensiles de tous genres. Particulièrement, tous les prisonniers français qui ont été employés avant la guerre dans une fabrique de machines à coudre sont sûrs qu’on leur proposera de travailler à Essen.

« S’ils acceptent, ils sont bien traités et reçoivent même un salaire raisonnable.

« S’ils refusent, il n’est pire misère qu’on ne leur fasse.

« Ce n’est pas dans les ateliers que j’ai connu Malet, mais au camp, un soir, en prenant un verre de munich à la cantine.

« Lui, il ne travaillait pas dans l’acier, mais dans la radiologie.

« Durant des mois, il avait été employé à la section de fabrication des voitures radiologiques militaires ; c’était sa partie. Quand ils surent qu’il avait travaillé avant la guerre à la Sorbonne, dans le laboratoire du professeur Laval, ils le firent entrer dans le laboratoire