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Page:Leroux - Rouletabille chez Krupp, 1944.djvu/64

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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

de la Tour Eiffel… Eh bien ! figurez-vous que j’ai pleuré ! Oui ! j’ai pleuré à l’idée que les Boches allaient abîmer Paris !… J’aime votre Paris à un point que vous ne pouvez pas imaginer, vous, qui me connaissez sous un aspect plutôt « je m’en fichiste », et que seuls peuvent comprendre certains étrangers qui y sont venus une fois et qui sont repartis bien loin et qui y pensent toujours !… J’aime Paris pour tout le plaisir de le voir qu’il m’a donné !… J’aime Paris parce que c’est ce qu’il y a de plus chic au monde !… Et je ne ferai jamais rien contre Paris ! Voilà ! »

Vladimir se tut, Rouletabille lui serra la main dans l’ombre :

« C’est bien, ça !… Mais est-ce que vous feriez quelque chose… pour Paris ?

— Certes !… Et avec quelle joie, quel enthousiasme !… El surtout… surtout, Rouletabille… si je devais travailler avec vous !… »

Le reporter entraîna Vladimir plus profondément sous la charmille…

Vingt minutes plus tard, quand ils revinrent sur le seuil de la lumière, déversée par les salons où l’on dansait, la figure de Vladimir était particulièrement grave. Les deux jeunes gens échangèrent encore une solide poignée de main, puis, tout à coup, Vladimir dit : « Elle est là ! » et il entra vivement dans le salon.

Rouletabille rentra, lui aussi, dans la salle de danse, pour voir le Slave esquisser les premiers pas d’un two step en compagnie d’une jeune femme d’une beauté un peu étrange et très fardée. Le couple avait un succès de curiosité marqué. Rouletabille demanda à une voisine :

« C’est la princesse Botosani, n’est-ce pas ?

— Oui, elle est folle de Vladimir Féodorovitch ! Ces grandes dames, vraiment, ne se gênent pas… »

Le reporter resta quelques instants à considérer la princesse avec une grande attention, puis il paya l’addition et sortit de l’hôtel.