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Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu/274

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SUR MON CHEMIN

leurs coins préférés, que chacun respectait. Et c’était toujours du même endroit qu’ils assistaient aux accès de laryngite de M. Garsonnet ou qu’ils fumaient leurs pipes. Ces pipes étaient en terre blanche, qu’ils culottaient, et, quand ils s’en allaient, ils les laissaient suspendues à des sortes de râteliers, tels les habitués du café du Commerce, dans un chef-lieu de canton.

Je vis bientôt que tout le quartier Latin se conduisait de la sorte et qu’il ne me fallait faire d’exception que pour quelques étudiants en médecine, pour quelques internes incorrigibles qui se livraient, dans les hôpitaux, à des facéties dont ils étaient universellement blâmés.

Cette ligne de conduite était générale. Elle se retrouvait partout, même dans les choses de l’amour. Ces messieurs étaient, pour la plupart, en ménage et déjà montraient toutes les qualités qui sont l’apanage des époux fidèles. Ils faisaient l’apprentissage des vertus domestiques. On abordait les dames de ces messieurs en leur donnant non point leurs noms de baptême, ce qui eût semblé trop familier, mais le nom de leurs amants. On demandait à l’ami rencontré des nouvelles de la santé de Mme X… Et vous appreniez que Mme X… avait attrapé un gros rhume, dans la nuit, en sortant de chez Beauvy.

De temps en temps, une manifestation venait troubler le train-train de la vie écolière. Mais elle était toujours anodine et peu compromettante. Les professeurs eux-mêmes ne s’y trompaient