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Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/558

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centes années en France le Crédit, foncier, plusieurs sociétés de transports, trente ou quarante départements, une centaine de villes et tous les particuliers solvables.

Quant à la facilité de former d’importantes et de rapides fortunes nouvelles, combien n’est-elle pas amoindrie par la baisse du taux de l’intérêt ? Combien n’est-il pas plus malaisé d’arriver avec des économies annuelles considérables à se faire un chiffre respectable de rentes et à pouvoir se retirer des affaires avec une opulence assurée ?

On a montré, dans le cours de cet ouvrage, toute la série de causes trop inaperçues qui tendent à réduire de plus en plus les profits des industriels et des commerçants. Les profits, tout en étant distincts de l’intérêt du capital, en suivent, d’ordinaire, les fluctuations, si bien que, lorsque l’intérêt baisse, les profits des industriels et des commerçants tendent à baisser dans une proportion équivalente. Cette assertion choque les préjugés vulgaires et paraîtra même, à quelques observateurs superficiels, contraire aux faits. Elle n’en est pas moins d’une vérité certaine. À la longue, non pas immédiatement, les bénéfices industriels et commerciaux fléchissent comme le taux de l’intérêt lui-même.

Que de causes d’ailleurs, toutes nouvelles et très actives, déprécient la situation des industriels et des commerçants ? La concentration des affaires leur porte un coup sensible ; la propagation de l’instruction et la vulgarisation de l’aisance mettent chaque jour un nombre de plus en plus grand de citoyens en possession des moyens intellectuels et moraux d’exercer convenablement le négoce ; il en résulte que la concurrence est de plus en plus pressante dans les professions commerciales. L’aléa se restreint, les opérations deviennent plus connues, les découvertes se répandent plus vite, les secrets industriels sont plus difficiles à garder. Toutes les industries déjà anciennes ne peuvent plus procurer que des gains réduits. Il n’y a guère que l’inventeur d’un produit nouveau ou d’un procédé perfectionné qui puisse faire rapidement fortune, s’il est assez heureux pour que ce procédé épargne beaucoup de dépenses ou pour que ce nouveau produit soit très goûté.