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Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/567

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bureau ; voilà les vrais pauvres dont la civilisation, si elle n’y prend garde, produira des légions à l’avenir.

Sans doute un temps viendra peut-être où l’instruction moyenne sera tellement vulgaire qu’elle ne donnera aucune haute opinion de lui-même à celui qui l’aura reçue, qu’on entendra un laboureur poussant sa charrue réciter les vers harmonieux des Géorgiques, ou qu’on verra les ouvriers des métiers les plus rebutants disserter avec compétence sur la physique et la chimie. Ce temps peut venir ; mais il est encore loin. On est trop près de l’âge où l’instruction était un monopole pour qu’elle ne gonfle pas d’espérances illimitées le nombre de ceux qui la possèdent. De là cette désertion des métiers manuels dont la rémunération hausse toujours, et cet encombrement des professions intellectuelles dont les profits s’abaissent. Jusqu’à ce qu’un lent travail d’adaptation se soit produit, jusqu’à ce que l’homme instruit se soit résigné à des tâches qui jusque-là étaient confiées aux simples illettrés, l’État, s’il ne veut pas, dans cette période de transition, être un agent de déclassement et de découragement, devra apporter beaucoup de mesure et de réserve à répandre ce que l’on appelle l’instruction intégrale et l’enseignement vraiment professionnel. Il devra s’en tenir à un enseignement préparatoire général.

Dans le mois de septembre dernier, on écrivait de Sydney au Times que les maçons gagnaient de 11 à 13 shellings (13 fr. 75 à 16 fr. 25) par journée de huit heures, et que la plupart des autres métiers manuels (mechanics) étaient payés à l’avenant : qu’au contraire les jeunes gens ayant de l’instruction ne pouvaient que très difficilement trouver à vivre. Ainsi un jeune homme de bon caractère et instruit, après avoir frappé pendant plusieurs années à beaucoup de portes, avait dû finir par se faire sergent de ville (I know one steady, well educated young man here, who after several years of knocking about, is now a policeman) ; un autre était parvenu à entrer dans une banque où il gagnait 75 livres sterling (1,875 francs) par an, tandis que la plupart des artisans, s’ils ont une bonne conduite, possèdent en peu d’années une maison à eux. Ces observations d’un Anglais d’Australie