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Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/295

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d’ordinaire à sa queuë, elle s’en seroit orgueillie si fort qu’elle auroit desdaigné d’estre pourveuë à un garçon du mestier de son père pour aller quérir ses estrennes chez le fils d’un president.

— Il ne se faut point estonner, repliqua la relevée, si ceste fille a laissé aller le chat au fromage de la sorte, car elle a desjà de l’aage, et ne manque point de courage pour sa qualité ; et puis, voyant qu’une sienne voisine avoit trouvé un bon party qui luy fait porter le satin et le damas, ne croyez-vous pas que cela ne luy ait faict du mal au cœur ?

— Veritablement, respondit la femme d’un confiturier qui s’est efforcée d’envoyer son mary en paradis par eschelle, si je pouvois trouver d’aussi bonnes fortunes, Dieu sçait si je ferois l’amour à si bon marché comme je fais ! car, estant soustenuë par des enfans de bonne maison, il n’y auroit personne qui m’osast regarder de travers, ny dire pis que mon nom.

Sur ce discours, la garde de laquelle a esté parlé cy-dessus, estant ennuyée de tant de sornettes, joint que l’appétit la tenoit autant au gosier comme il luy tient par fois au cul, ne fut honteuse de dire tout haut : Ne vous desplaise, Mesdames, si je vous interromps ; il vaut mieux gouster à bon escient, puisque la collation est preste, que de parler tant d’amour comme vous faictes. Par ma foy, il vaut mieux n’en guères dire et en faire da-