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Page:Les Sérails de Londres, 1911.djvu/30

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LES SÉRAILS DE LONDRES

pour cet endroit de libertinage et de dissipation. La malheureuse qui mourait de faim tandis qu’elle lavait sa seule et unique chemise, était sûre, en entrant dans cet infâme lieu, d’y rencontrer un jeune apprenti qui la régalait d’une tranche de mouton et d’un pot de bière, et s’il avait un peu d’argent, elle lui faisait payer pour dix-huit sols de punch, et l’engageait à passer le reste de la nuit avec elle.

Lucy Cooper avait coutume de venir fréquemment dans ce séjour de prostitution, non qu’elle eût l’intention de disposer de ses charmes à un prix aussi vil que celui de cet endroit, ni qu’elle y fût conduite par la nécessité, car elle était alors élégamment entretenue par feu le baronnet Orlando Br...n, un vieux débauché qui était si enchanté de ses reparties, qu’il l’aurait épousée, si elle n’avait pas eu la générosité de refuser sa main pour ne point couvrir sa famille de déshonneur. Quoiqu’il ne lui laissât manquer de rien et qu’il eût pour elle tous les soins imaginables, la voiture de Lucy était souvent arrêtée pendant vingt-quatre heures, et quelquefois plus, à la porte de Weatherby. D’après ce récit, le lecteur est sans doute curieux de savoir ce qui la portait à fréquenter cette maison de débauche, plutôt que de rester dans son hôtel. La dissipation était sa devise ; elle haïssait le baronnet ; et chez Weatherby elle