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Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/135

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RENART, TYBERT ET LA QUEUE DU CHAT.

nuiroit à mes intérêts. Faisons mieux : allons d’abord au lait, il en restera pour toi, je t’assure. — J’ai promis de te suivre, » répond Renart que le lait tente bien un peu ; « allons donc à la huche. »

Tybert montre le chemin, entre dans la maison, et désignant le grand coffre à son compagnon : « Soulève le couvercle, ami Renart, afin que j’y puisse entrer le premier : tu sais nos conventions. » Renart fait ce qu’on lui dit ; Tybert passe la tête, le corps, la queue ; il se met à l’œuvre et lappe le lait avec recueillement. Renart soutenoit le couvercle, mais la vue du lait le faisoit geindre et frémir de convoitise. La langue lui bruloit en voyant Tybert humer avec tant de plaisir. « Ah ! Tybert, tu te trouves bien là, il me semble ; tu as tout ce que ton cœur vouloit. Maintenant, sois bon compain ; remonte, car par saint Denis je suis fatigué de soulever ce pesant couvercle, et je n’aurois pas la force de continuer. « Remonte, mon cher Tybert, mon bon Tybert !… »

L’autre, préoccupé de son lait, ne perdoit pas le tems à répondre. Vainement Renart accumuloit les douces suppliques : « Bel ami, hâte-toi, de par Dieu ! je n’en puis plus ; je vais laisser retomber la huche. » Toutes les paroles étoient inutiles, Tybert huma tant