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Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/168

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VINGT-HUITIÈME AVENTURE.

C’est bien, Renart, je suis content. Mais, dites-moi, qui vous apprit à si bien faire les partages ? — Sire, » répond Renart, « le chaperon rouge d’Ysengrin est pour moi de grande autorité. Je suis même tenté de croire que la couronne que vous lui avez faite indique un cardinal, sinon l’Apostole lui-même. Ô la belle couleur de pourpre ! il faut s’incliner devant elle. »

« — Maître Renart, maître Renart, » fait le Roi en lui passant doucement le bras sur l’oreille, « vous êtes un subtil personnage, et vous savez mieux que votre pain manger. Tant pis pour qui refuseroit vos bons services ; vous retenez bien ce qu’on dit, et vous savez profiter à merveilles des sottises d’autrui. Demeurez ici tous les deux et de bonne amitié ; mais je conseille à Ysengrin, s’il veut s’épargner de grands regrets, de mieux repartir une autre fois. Pour moi, j’ai de grandes affaires qui m’obligent à m’éloigner. Cherchez, parcourez ces bois, et si vous y trouvez votre dîner, je vous permets de le prendre. Adieu, Renart ! bien partagé, vraiment, bien partagé !

— Eh bien, sire Ysengrin, que vous en semble ? » dit Renart, dès que Noble se fut éloigné emmenant la proie devant lui ; « le Roi nous a-t-il assez outragés ? des barons tels que