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Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/362

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NOUVELLE ÉTUDE

c’est une suite de récits détachés qu’il seroit impossible de coordonner. On y reconnoît les lambeaux dispersés ou interpolés d’un poëme original, et non ce poëme-là même.

Au lieu de répondre directement à cette objection, je vais dire comment il me semble qu’a dû se former le Renart françois.

Les fables æsopiques, imitées et continuées en vers latins et même en prose latine, sont, comme on a vu, les premières sources dans lesquelles aient puisé les trouvères françois.

Les fables le mieux accueillies se rapportant aux aventures du Renart et du Loup, les trouvères durent en faire le sujet de nombreux récits, tous plus ou moins éloignés des textes latins qu’ils avoient sous les yeux.

Ces risées et ces gabets, comme les appelle Pierre de Saint-Cloud, couroient déjà les provinces, quand, dans le second tiers du douzième siècle, un trouvère fit une sorte de révolution dans la légende populaire et françoise de Renart, en traitant pour la première fois le sujet de la grande guerre soulevée entre le goupil ou Renart, et le loup ou Ysengrin. On peut hésiter à penser que celui qui introduisit dans la poésie françoise ce nouvel element ait continué l’œuvre qu’il avoit commencée : mais, dans ce cas-là même, on peut assurer que le sujet fut immédiatement repris par un autre trouvère anonyme, auquel nous devrions la meilleure partie de ce qui plus tard forma le cycle de Renart.

Voici les raisons qu’on pourroit alléguer pour soutenir que l’anonyme, auteur de la première branche, n’a pas poursuivi le récit :

Ce premier anonyme donne à la femme de Renart