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Page:Levoyageauparnas00cerv.djvu/359

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dizain formé de deux stances de cinq vers, et qui est une des formes les plus heureuses de la versification espagnole. En espagnol, Decimas et Espinelas sont synonymes. Espinel ajouta une cinquième corde à la guitare ; et cette invention contribua très-fort à rendre son nom populaire en Espagne. Lope de Vega, qui était son ami et un peu son protecteur dans ses dernières années, a fait deux fois son éloge dans le Laurier d’Apollon. C’est par lui que nous savons qu’Espinel mourut nonagénaire :

Noventa años viviste,
Nadie te dió favor, poco escribiste.

Cervantes et Espinel avaient longtemps vécu en bonne intelligence ; mais leur amitié fut troublée lorsqu’ils étaient l’un et l’autre d’un âge avancé. Cervantes rend justice à son talent d’inventeur et d’écrivain ; mais il remarque que sa critique était mordante, et il rappelle à ce propos le nom de Zoïle. Dans la courte introduction au récit des aventures de l’écuyer Marcos de Obregon, Espinel nous apprend qu’il faisait aussi un peu de médecine, mais de cette médecine qui plaît si fort au vulgaire et dont il se moquait tout le premier. Ce qu’on peut dire de lui comme écrivain, c’est qu’il est resté fidèle aux deux lois qu’il s’était imposées, de narrer brièvement et de ne rien écrire de blâmable, « guardando siempre brevedad y honestidad. » Comme Cervantes, Espinel reçut les bienfaits de don Bernardo de Sandoval y Rojas, archevêque de Tolède. On suppose, non sans vraisemblance, que l’histoire de Marcos de Obregon est en grande partie le récit de ses propres aventures. « Diverses rimas de V. Espinel, » Madrid. 1591, in-8. « El Escudero Marcos de Obregon, » Madrid, 1618, in-8.