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Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/15

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PRÉFACE DE L’AUTEUR

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IMITATION D’HORACE.
Ep. 20. — L. 1.


Il me semble, ô livre vain et sans jugement ! que je te vois lancer un regard de désir là où les réputations s’acquièrent et se perdent dans la fameuse rue appelée Pater-Noster. Furieux que ta précieuse olla podrida soit ensevelie dans un portefeuille oublié, tu dédaignes la serrure et la clef prudentes, et tu aspires à te voir, bien relié et doré, figurer aux vitres de Stockdale, de Hookham ou de Debrett. Va donc, et passe cette borne dangereuse d’où jamais livre ne peut revenir ; et quand tu te trouveras condamné, méprisé, négligé, blâmé et critiqué, injurié de tous les lecteurs de ta chute (si tant est que tu en aies un seul), tu déploreras amèrement ta folie, et tu soupireras après moi, mon logis et le repos.

Maintenant, faisant l’office de magicien, voici la destinée future que je te prophétise : dès que ta nouveauté sera passée, et que tu ne seras plus jeune et neuf, jetées dans quelque sombre et sale coin, moisies et toutes couvertes de toiles d’araignée, tes feuilles seront la proie des vers ; ou bien, envoyées chez l’épicier, et condamnées à subir les brocards du public, elles garniront le coffre ou envelopperont la chandelle.