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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/152

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THUCYDIDE, LIV. II.

sortirent du territoire de Platée sans y faire aucun mal, et que les Platéens n’eurent pas plutôt transporté à la hâte dans la ville tout ce qui se trouvait dans la campagne, qu’ils massacrèrent les prisonniers. Il y en avait cent quatre-vingts. De ce nombre était Eurymaque, à qui les traîtres s’étaient adressés.

Chap. 6. Après cette exécution, ils députèrent à Athènes, permirent aux Thébains d’enlever leurs morts, et firent dans la ville les dispositions qu’ils crurent nécessaires.

Dès qu’on eut annoncé à Athènes ce qu’avaient souffert les Platéens, on arrêta tout ce qui se trouvait de Béotiens dans l’Attique, et l’on envoya un héraut dire à ceux de Platée de ne prendre aucun parti sur les Thébains qu’ils avaient en leur pouvoir, qu’Athènes n’eût elle-même statué sur leur sort ; car on n’y avait pas annoncé qu’ils n’étaient plus. Le premier message était parti aussitôt après l’arrivée des Thébains : le second, au moment où ils venaient d’être vaincus et arrêtés, et l’on ne savait encore à Athènes rien de ce qui avait suivi. C’était dans cette ignorance du fait qu’on avait dépêché le héraut. À son arrivée, il trouva les prisonniers égorgés. Les Athéniens vinrent ensuite en corps d’armée à Platée, y portèrent des subsistances, laissèrent une garnison, et emmenèrent les hommes inutiles avec les femmes et les enfans.

Chap. 7. Cet événement de Platée devenait une éclatante rupture de la trève ; les Athéniens se préparèrent à la guerre. Les Lacédémoniens et leurs alliés firent de même. Chacun des deux partis se disposa à députer chez le grand roi et en d’autres pays barbares d’où il pouvait espérer des secours de surcroît, et s’efforça d’attirer à son alliance des peuples hors de sa domination. Indépendamment des vaisseaux que les Lacédemoniens avaient dans le Péloponnèse, il fut ordonné dans l’Italie et dans la Sicile, aux villes du même parti, d’en fournir en proportion de leur étendue, jusqu’au nombre de cinq cents ; de préparer une somme d’argent déterminée ; de se tenir d’ailleurs en repos, et de ne recevoir à-la-fois dans leurs ports qu’un seul vaisseau d’Athènes, jusqu’à ce que tous les apprêts fussent terminés. Quant aux Athéniens ils s’assuraient de la fidélité de leurs anciens alliés, et députaient dans les pays plus voisins, le Péloponnèse, Corcyre, Céphallénie, les Acarnanes, Zacynthe. S’ils pouvaient se fier à leur amitié, ils se rendraient plus sûrement maîtres des côtes du Péloponnèse.

Chap. 8. Les deux partis ne prenaient point de faibles mesures ; c’était de toutes leurs forces qu’ils se préparaient à la guerre. Cela devait être ; car c’est toujours en commençant qu’on a le plus d’ardeur. Une jeunesse nombreuse dans le Péloponnèse, une jeunesse nombreuse à Athènes, faute d’expérience, s’engageait sans répugnance à la guerre. Au spectacle de cette fédération des villes principales, les esprits s’exaltaient dans le reste de l’Hellade. Dans les villes qui allaient combattre, et ailleurs, on débitait quantité d’oracles en prose : les devins y chantaient quantité de prédictions en vers. Délos, peu auparavant, avait été ébranlée par un tremblement de terre ; elle qui, de mémoire d’Hellènes, n’en avait pas éprouvé d’autre. On disait, et l’on crut, que c’était un présage de ce qui devait se passer. On faisait une curieuse recherche de tous les événemens de ce genre qui avaient pu arriver. La faveur des Hellènes inclinait fortement vers les Lacédémoniens, surtout parce que ces derniers avaient annoncé qu’ils voulaient délivrer l’Hellade. C’était, entre les particuliers et les villes, à qui les seconderait, soit en paroles,