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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/257

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THUCYDIDE, LIV. IV.

Corinthiens, où Lycophron se défendait contre la gauche des ennemis ; car on soupçonnait qu’ils feraient une tentative contre Solygie.

Chap. 44. L’action se soutint long-temps ; aucun des deux partis ne cédait. Mais les Athéniens éprouvèrent l’utilité de leur cavalerie ; les Corinthiens, qui n’en avaient pas, furent enfin repoussés, et se retirèrent sur la colline, y campèrent, ne descendirent plus, et se tinrent dans l’inaction. Cette défaite leur avait coûté la plus grande partie de ceux qui avaient combattu à l’aile droite, et le général Lycophron. Le reste de l’armée, se voyant forcé dans sa position, mais n’étant point pressé vivement, fit sa retraite sur les hauteurs et s’y établit. Les Athéniens, contre qui personne ne se présentait plus, dépouillèrent les morts de l’ennemi, recueillirent les leurs, et dressèrent aussitôt un trophée.

Cependant la moitié de l’armée corinthienne, restée campée à Cenchrée pour empêcher les Athéniens de se porter sur Crommyon, n’avait pu apercevoir le combat que lui cachait le mont Onium ; mais, à la vue de la poussière qui s’élevait, elle pressentit l’événement et accourut. Au même moment arrivèrent les vieillards de Corinthe, qui s’étaient mis en marche, devinant ce qui venait de se passer. Les Athéniens, à leur approche, croyant que c’était un secours des villes voisines, se hâtèrent de monter sur leurs vaisseaux, emportant toutefois les dépouilles et leurs morts, excepté deux qu’ils n’avaient pu retrouver. Ils gagnèrent les îlots voisins, et de là firent demander et obtinrent la permission d’enlever les deux corps qu’ils avaient laissés. Les Corinthiens avaient perdu dans ce combat deux cent douze hommes ; les Athéniens un peu moins de cinquante.

Chap. 45. Ceux-ci quittèrent les îles, et se portèrent le même jour à Crommyon, dans la Corinthie, à cent vingt stades de Corinthe. Ils y prirent terre, ravagèrent les champs, et y restèrent campés pendant la nuit. Le lendemain, ils voguèrent d’abord vers l’Épidaurie, y firent une descente, et passèrent à Méthone, entre Épidaure et Trézène. Ils construisirent un mur sur l’isthme de la péninsule, où est Méthone, coupèrent ainsi toute communication de la péninsule avec le continent, et mirent garnison. De là ils allèrent ravager la Trézénie, l’Halie, l’Épidaurie ; et, après avoir achevé les fortifications, ils se rembarquèrent et retournèrent chez eux.

Chap. 46. Pendant que ces événemens se passaient, Eurymédon et Sophocle partirent de Pylos pour la Sicile avec la flotte d’Athènes, et abordèrent à Corcyre. Ils se joignirent aux Corcyréens de la ville pour attaquer la faction qui, après les troubles, retirée sur le mont Istone, dominait sur la campagne et la ravageait. Le fort qui servait d’asile à ces bannis fut battu et emporté ; mais les hommes parvinrent à se sauver sur une hauteur. Là ils capitulèrent, et convinrent de livrer leurs troupes auxiliaires, de rendre les armes, et de s’abandonner au jugement du peuple d’Athènes. Ils reçurent la parole des généraux qui les transportèrent dans l’île de Ptychie, où ils devaient être gardés jusqu’à leur transport à Athènes ; mais si l’un d’eux était pris en essayant de s’évader, la convention était annulée pour tous. Les chefs de la faction populaire, craignant que les Athéniens ne laissassent la vie à ces malheureux, leur tendirent un piége. Ils en trompèrent plusieurs, en subornant un petit nombre de leurs amis qu’ils leur firent passer. Ceux-ci étaient chargés de leur dire, comme par bienveillance, qu’ils n’avaient d’autre parti à prendre que celui d’une prompte fuite ; qu’eux-mêmes leur fourniraient un bâ-