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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/314

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THUCYDIDE, LIV. V.

démone, qui commandait les Héracléotes, fut tué avec nombre des siens.

L’hiver finit, et avec lui la douzième année de la guerre.

Chap. 52. Dès le commencement de l’été suivant, comme, depuis cette bataille, Héraclée dépérissait, les Béotiens la reçurent sous leur protection, et chassèrent Hégésippidas le Lacédémonien, dont l’administration n’était point agréable. En prenant cette place, ils songeaient aux Athéniens, qui auraient pu s’en emparer à la faveur des troubles du Péloponnèse : mais cette intention ne les justifia nullement auprès des Lacédémoniens.

Le même été, Alcibiade, fils de Clinias, alors général des Athéniens, passa, d’intelligence avec les Argiens et leurs alliés, dans le Péloponnèse, accompagné d’un petit nombre d’hoplites et d’archers d’Athènes, ainsi que des alliés du pays. En le traversant avec son armée, il y régla ce qui intéressait l’alliance, persuada aux habitans de Patras de prolonger leurs fortifications jusqu’à la mer, et lui-même conçut le projet d’en élever d’autres sur le promontoire de Rhium d’Achaïe. Mais les Corinthiens, les Sicyoniens et les habitans des autres villes auxquelles ces constructions auraient nui, accoururent pour s’y opposer.

Chap. 53. Le même été s’éleva une guerre entre les Épidauriens et les Argiens, sous le prétexte d’une victime que les premiers devaient à Apollon pythien, pour la dîme des pâturages, et qu’ils n’avaient pas envoyée. Aux Argiens surtout appartenait l’intendance de l’hiéron ; mais, quand ils n’auraient pas eu de prétexte, ils étaient décidés, ainsi qu’Alcibiade, à s’emparer, s’il était possible, d’Épidaure : en même temps qu’ils retiendraient Corinthe en respect, les Athéniens auraient, pour leur amener du secours d’Égine, moins de chemin à faire qu’en tournant le cap Scyllæeum. Les Argiens se disposèrent donc à l’attaque de cette place, comme pour obliger les habitans à fournir la victime.

Chap. 54. Vers le même temps, les Lacédémoniens, avec toutes leurs forces, sortant du territoire de Sparte, marchèrent contre le Lycéum, dans les plaines de Leuctres, sur leurs frontières. Le roi Agis, fils d’Archidamus, les commandait. Tout le monde, même les ville, qui fournissaient des troupes, ignorait où il portait ses armes. Mais les diabatères (sacrifices faits au moment de franchir les frontières) n’ayant pas donné d’heureux présages, ils rentrèrent dans Sparte, et firent dire à leurs alliés de se tenir prêts à entrer en campagne le mois suivant (on était dans le mois carnien, qui est pour les Doriens un temps de fêtes). Ils étaient de retour quand les Argiens, quatre jours avant la fin de ce mois, partirent, quoique dans un jour fêté par eux de temps immémorial, fondirent sur l’Épidaurie, et la ravagèrent. Les Épidauriens implorèrent leurs alliés, mais de ceux-ci, les uns s’excusèrent sur le mois carnien, les autres s’avancèrent jusqu’à la frontière et restèrent dans l’inaction.

Chap. 55. Pendant que les Argiens étaient sur le territoire d’Épidaure, les députations des villes se rassemblaient à Mantinée, sur l’invitation des Athéniens. Les conférences se tenaient, quand Euphamidas de Corinthe observa que les faits s’accordaient mal avec les discours : pendant que, réunis et tranquillement assis, ils traitaient de la paix, les Épidauriens, leurs alliés, et les Argiens, étaient rangés en armes les uns contre les autres ; il fallait d’abord que ceux qui tenaient à l’un ou à l’autre parti, allassent séparer ces armées, et l’on se remettrait ensuite à parler d’un accord.