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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/808

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ARRIEN, LIV. II.

que vous n’êtes plus mon égal ; que l’empire est à moi. Autrement je l’aurai à injure. Si vous en appelez du titre de roi à un autre combat, ne fuyez point ; je vous atteindrai partout. »

Sur ces entrefaites, apprenant que les trésors de Darius conduits par Cophenès à Damas, les gardes mêmes, et tout ce qui faisait l’orgueil et le luxe du monarque persan était tombé en son pouvoir, il les laisse dans cette ville aux soins de Parménion.

Alexandre fait amener devant lui les envoyés que la Grèce avait députés vers Darius avant l’événement, et qui étaient au nombre des prisonniers, savoir : Euthyclès de Lacédémone ; Iphicrate, fils du général Athénien de ce nom ; Thessaliscus et Dionysodore, vainqueur aux jeux olympiques. Il renvoya aussitôt ces deux derniers quoique Thébains, soit par commisération pour les malheurs de leur cité, soit que l’excès même de la vengeance des Macédoniens qui la détruisirent, excusât leur démarche auprès de Darius. Il les traita donc avec bonté ; il dit à Thessaliscus : Je vous pardonne par considération pour votre naissance. Il était en effet un des premiers de Thèbes. Et à Dionysodore : En faveur de votre victoire aux jeux olympiques. À Iphicrate : À cause de l’amour que je porte aux Athéniens, et de la gloire de votre père. Il le retint auprès de lui avec honneur tant qu’il vécut, et après sa mort il fit porter à Athènes ses cendres qu’on rendit à sa famille.

Pour Euthyclès, comme il était Lacédémonien, et que ce peuple était en guerre ouverte avec Alexandre ; comme d’ailleurs il ne présentait, par lui-même, aucun titre de grâce, il fut retenu prisonnier sans être dans les fers ; et le succès achevant de couronner les entreprises d’Alexandre, il fut remis en liberté.

Chap. 7. Alexandre quitte Marathe, et reçoit à composition Biblos et Sidon, appelé par l’inimitié que les habitans portaient à Darius et aux Perses.

Il marche vers Tyr. Des députés de cette ville viennent à sa rencontre pour lui annoncer une entière soumission à ses ordres. Il donne de justes éloges à la ville et à la députation composée des principaux habitans, et où se trouvait l’héritier même du trône (car le roi Azelmicus faisait voile avec Autophradates) ; il ajoute qu’il ne demande à entrer dans la ville que pour offrir un sacrifice à Hercule.

En effet, le temple qu’on y voit de ce Dieu est, de mémoire d’homme, un des plus anciens. Ce n’est point celui d’Hercule argien, fils d’Alcmène. Le culte de l’Hercule tyrien remonte à une époque qui précède la fondation de Thèbes par Cadmus, et la naissance de sa fille Sémélé qui donna le jour à Bacchus. Ce dernier, fils de Jupiter, était contemporain de Labdacus, né de Polydore ; tous deux étaient petits-fils de Cadmus. Or, Hercule argien vivait du temps d’Œdipe, fils de Laïus. Les Égyptiens adorent un Hercule, qui n’est ni celui des Grecs, ni celui des Tyriens. Hérodote le place au nombre des douze grands dieux : c’est ainsi qu’Athènes invoque un Bacchus, fils de Jupiter et de Proserpine, lequel diffère du Bacchus thébain : l’hymne mystique du premier n’est point adressé à l’autre. J’incline à croire que l’Hercule tyrien est le même que celui révéré par les Ibères à Tartesse, où l’on remarque deux colonnes qui lui sont consacrées. En effet, Tartesse a été fondée par des Phéniciens ; la structure du temple, le rite des sacrifices, tout indique cette origine.