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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/835

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ARRIEN, LIV. IV.

deux jours, Alexandre marche sur Cyropolis. Cette place, bâtie par Cyrus, avait des murs plus élevés et plus solides que les autres. En outre les Barbares les plus belliqueux s’y étaient retirés en grand nombre. Les Macédoniens ne purent la prendre du premier abord. Alexandre, ayant fait approcher les machines, se disposait à battre le mur et à pénétrer par la première brèche ; il observe que le canal du fleuve qui traverse la ville est à sec, et livre un passage facile aux siens ; il prend avec lui ses gardes, les Hypaspistes, les archers et les Agriens, et tandis que les Barbares sont occupés sur leurs murailles, il se glisse par le canal, avec un petit nombre des siens, dans la ville, dont il fait briser les portes ; ses troupes y entrent sans résistance. Les Barbares, voyant l’ennemi au milieu d’eux, se réunissent contre ceux d’Alexandre ; l’action la plus vive s’engage. Le roi reçoit un coup de pierre à la tête ; Cratérus et plusieurs autres chefs sont atteints de flèches : enfin les Barbares sont chassés de la place publique, tandis que les assaillans forcent le mur abandonné. Huit mille tombèrent sous le fer du vainqueur ; dix mille qui restaient se retranchent dans la citadelle, où ils sont assiégés par Alexandre ; mais comme ils manquaient d’eau, ils se rendirent dès le lendemain.

La septième ville fut prise d’emblée, si l’on en croit Aristobule, et ses défenseurs mis à mort ; mais Ptolémée prétend qu’elle se rendit ; qu’Alexandre distribua les prisonniers dans son armée, et les fit garder étroitement jusqu’à son départ de la contrée, ne voulant y laisser aucun de ceux qui avaient pris part à la révolte.

Cependant à la nouvelle de la défection des Barbares, l’armée des Scythes Asiatiques s’avançait jusqu’au Tanaïs, prête à fondre sur les Macédoniens, pour peu que le désordre fût considérable ; d’un autre côté, Spitamène assiégeait la garnison de Maracanda. Alexandre détache contre lui Andromaque, Ménédème et Caranus, avec soixante Hétaires, quinze cents stipendiaires à pied, et huit cents à cheval, dont Caranus était le chef. Tout ce détachement marche sous les ordres d’un interprète Lycien, nommé Pharnuque, instruit de la langue des Barbares, et par là propre aux négociations.

Alexandre cependant bâtissait la ville sur le Tanaïs ; ses murs élevés le vingtième jour de travail, reçoivent les Grecs à sa solde, ceux des pays voisin qui voulurent y habiter, et quelques Macédoniens hors d’état de servir.

Il sacrifiait aux Dieux selon le rite accoutumé, et faisait célébrer des jeux gymniques et des courses à cheval, quand il vit sur la rive opposée, des Scythes qui, loin de se retirer, harcelaient les Grecs à coups de traits, le fleuve ayant très peu de largeur. Ils ajoutaient la provocation à l’outrage. « Alexandre, tu n’oses te mesurer aux Scythes ; si tu l’osais, tu sentirais combien ils diffèrent des Barbares de l’Asie. »

Irrité de ces injures, Alexandre veut traverser le fleuve et ordonne pour le passage les dispositions accoutumées. Le ciel consulté par des sacrifices n’annonce rien de favorable. Ce présage déplaît au roi ; cependant il cède, il s’arrête. Mais les Scythes continuant à le provoquer, il ordonne de nouveaux sacrifices. Aristandre lui annonce le danger du passage. « Il n’en est point que je n’affronte, plutôt que de me voir, moi vainqueur de presque toute l’Asie, insulté par des Scythes, comme le fut autrefois Darius. — Mon devoir est de vous révéler la vo-