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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/136

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manœuvres de la phalange. Il songea de suite à s’emparer de Scotuse bâtie à quatre journées de son camp, dans une vallée qui terminait d’un côté la chaîne des montagnes.

Cette ville, bien approvisionnée, pouvait fournir à la subsistance de son armée, dans ce pays ingrat où il devait faire quelque séjour ; elle lui conservait d’ailleurs la communication de l’un et de l’autre côté des montagnes ; et, au cas que Q. Flaminius vînt le chercher dans ce poste, il était maître de profiter du terrain, de choisir à l’avance des positions sagement calculées, et un champ de bataille avantageux.

Ayant les mêmes raisons que Philippe pour occuper Scotuse, non seulement le proconsul en forma la résolution, mais il prit à peu près des mesures semblables. Il occupait le côté de la montagne qui offrait le chemin le moins embarrassé, et c’était un avantage qu’il avait sur le roi de Macédoine. Cependant les deux généraux s’étudièrent à se cacher leur marche, et détachèrent vers les hauteurs des petits corps de troupes irrégulières et quelque cavalerie, avec ordre de s’y montrer et même d’engager l’action si l’ennemi s’y présentait. Bientôt ces détachemens s’abordèrent, et la cavalerie étolienne, accoutumée à manœuvrer dans les lieux difficiles, mit l’avantage du côté des Romains.

Pendant cette escarmouche, les deux armées se mirent en marche. Philippe et Q. Flaminius firent bien côtoyer les hauteurs qui régnaient entre les deux armées ; mais soit qu’on n’osât se montrer sur les sommets, ou que l’on ne fît pas assez de diligence, chacun, en se flattant de laisser l’ennemi derrière, ignorait ses mouvemens.

Le proconsul marcha le premier jour jusqu’à Érétrie ; et le roi campa près d’une petite rivière nommée Onchytus, les montagnes séparant toujours les deux armées ; le lendemain les Macédoniens arrivèrent à Melambium, et les Romains à Thetidium, bourgade de la Thessalie, près de la vieille et de la Nouvelle-Pharsale, suivant Polybe.

Le troisième jour, sur le matin, il s’éleva un terrible orage, et le temps devint si couvert et si sombre, qu’à peine on voyait autour de soi à quelques pas. Philippe n’en continua pas moins sa marche.

Il avait sur son chemin de hautes montagnes qui se prolongeaient à une grande distance, hors de la chaîne, et pouvait éviter par un détour ce passage difficile ; mais il craignit de perdre du temps. Toutefois, comme la pluie ne cessait point, on fit une halte avant de passer les montagnes, et la plus grande partie de ses troupes légères prit les devans, avec ordre de reconnaître les chemins, et de s’établir le mieux possible sur les sommets, afin de couvrir l’armée.

Le proconsul, qui, le jour précédent, trouva le chemin plus facile que ne l’était celui du roi, avait fait aussi une marche plus forte ; en sorte qu’il campa la nuit en-deçà des montagnes, environ vis-à-vis des endroits où s’arrêtèrent les Macédoniens. Jusqu’alors le proconsul avait côtoyé les hauteurs ; il conçut l’idée d’y faire monter des troupes légères ; et peut-être, entrevoyant dans ce moment la possibilité de la marche de Philippe, eût-il connaissance de cette saillie de montagnes qui coupait le chemin à l’armée macédonienne.

Cette situation des lieux devenait très propre à découvrir entièrement l’ennemi ; les pentes très douces du côté de Q.  Flaminius l’y invitaient encore ; dès que la pluie fût un peu diminuée, le procon-