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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/188

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passa l’Euphrate à sa source, se retira dans la Colchide, et ensuite dans le Bosphore.

Telle était cependant son activité, qu’il avait déjà rassemblé une nouvelle armée avec laquelle il battit les Chattènes, peuples qui bordaient l’Arménie et s’étaient réunis aux Ibères pour lui disputer le passage ; non qu’ils fussent alliés des Romains, car ils s’opposèrent également à Pompée quand ce général se présenta sur leurs terres en poursuivant Mithridate ; mais vraisemblablement parce que le système politique de ces peuples les portait à ne point laisser entrer de troupes étrangères dans leur pays, si toutefois ces peuples avaient un système politique.

Le roi prenait des avances trop considérables pour qu’il fût possible à Pompée de lui couper la retraite. Il songea dès lors à tourner ses pas vers l’Arménie afin de combattre Tigranes ; mais ce prince, qui n’osait s’exposer à de nouvelles défaites, vint demander le joug.

Le général romain marcha de nouveau à la poursuite du roi de Pont. Il battit les Albanais et les Ibères en plusieurs rencontres, et prit ses quartiers d’hiver sur les bords du fleuve Cyrrhus. Au commencement du printemps Pompée se mit en marche, et traversa des déserts immenses, n’ayant d’autre guide dans sa route que les étoiles.

Cependant Mithridate avait passé l’hiver à Dioscurias, capitale de la Colchide. Il traversa les contrées de ces peuples barbares, qui, pénétrés, la plupart, de respect et d’admiration, s’empressèrent de lui fournir tout ce qui pouvait manquer à ses troupes. Pompée qui l’avait suivi jusqu’au Phase, n’osant s’engager plus loin, donna l’ordre à Servilius qui commandait la flotte romaine, de couper par mer les subsistances à Mithridate, et il vint achever de soumettre les places de ses états.

Il en forma onze petites républiques, toutes tributaires, et marcha ensuite vers la Syrie pour combattre Aretus, roi des Arabes, et couvrir par quelque action d’éclat la négligence avec laquelle il conduisait la guerre contre le roi de Pont.

Mithridate avait profité de ce relâche et s’était emparé de plusieurs places importantes aux environs du Bosphore. Là des chantiers, établis par ses ordres, servaient à construire des vaisseaux, tandis que les ateliers dont il avait couvert le pays forgeaient continuellement des armes.

Avant de rien entreprendre il voulut tenter encore la voie des négociations, et demanda la restitution des états qu’il tenait de son père, abandonnant ce qu’il avait conquis. Pompée promit de les lui rendre, s’il venait, comme Tigranes, se soumettre en personne. — « Une démarche aussi basse, répondit le roi, serait indigne de Mithridate ; j’enverrai un de mes fils. » Le général romain ayant rejeté ces conditions, le prince acheva de se disposer à la guerre.

Des ennemis vainqueurs, des troupes qui ne servaient qu’à regret, des peuples mécontens, des enfans séditieux, il n’était rien que Mithridate ne dût craindre. Pour se ménager des ressources, il résolut de faire alliance avec les principaux souverains de Scythie, en leur donnant des filles en mariage. Elles partirent sous la conduite de quelques eunuques, qui furent massacrés par l’escorte ; les soldats enlevèrent les filles et partagèrent l’argent.

Toujours traversé dans ses desseins, et cependant incapable de se laisser abattre, Mithridate jeta les yeux sur les Gaulois, et du fond des marais où il était relégué ce prince fugitif osa for-