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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/261

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métriques (près de cinq lieues) dans sa circonférence, fut faite comme l’autre, avec les mêmes obstacles.

Ayant terminé ses deux lignes du côté de la ville et de la campagne, César voulut leur donner plus de défense en rendant les approches d’une extrême difficulté. Ce fut alors qu’il imagina cette triple barrière dont le plan et l’exécution révèlent si bien son génie. Ces travaux sous Alise excitèrent un tel enthousiasme dans Rome, qu’on y disait qu’un mortel oserait à peine les entreprendre, mais qu’un dieu seul pouvait les terminer.

César traça un fossé de cinq pieds de profondeur devant l’une et l’autre ligne, et il y fit planter cinq rangs de troncs d’arbres ou de fortes branches aiguisées à la tête, et liées ensemble par le bas ; ensuite, en avant de ce premier obstacle, on creusa huit rangs de puits de trois pieds de profondeur, rangés en quinconce, et distans l’un de l’autre de trois pieds. Dans chacun de ces puits qui se rétrécissaient insensiblement, on enterra des pieux ronds de la grosseur de la cuisse, brûlés et aiguisés par le bout, et qui ne sortaient du fond qu’à la hauteur de quatre doigts ; le tronc fut couvert d’herbes et de broussailles pour cacher le piége ; enfin, au-devant de ce formidable appareil, César sema une immense quantité de chausse-trapes, hameçons de fer, attachés à un gros bâton de la longueur d’un pied, qui se fichait jusqu’aux aiguillons.

Il y avait autour du mont Auxois des hauteurs et des vallons d’un accès et d’un passage très-difficiles ; les travaux dûrent s’en ressentir. Mais malgré ces obstacles, et encore que la ligne de circonvallation présentât un développement de près de cinq lieues, César dit qu’il était venu à bout de la mettre en état de résister à l’armée de secours. Cette ligne avait son fossé de cinq pieds rempli d’arbres, ses huit rangs de puits en échiquier, ses chausse-trapes, en un mot, la triple barrière que César avait cru devoir ajouter à sa ligne de contrevallation dirigée sur Vercingetorix.

Ce travail prodigieux ne prit qu’environ quarante jours. L’armée de César se montait à près de quatre-vingt mille hommes ; elle était composée de dix légions, de quatre mille cavaliers, et de troupes auxiliaires. Sa confiance dans ses légions était si grande, qu’il disait souvent qu’avec elles, il pourrait bouleverser le ciel. Il se fit une si terrible consommation de bois sous Alise, que, les forêts des environs ne suffisant plus, on fut obligé d’aller se pourvoir au loin.

Sur ces entrefaites, les Gaulois assemblaient une forte armée dont ils donnèrent le commandement à quatre généraux. Le plus estimé était Commius l’Atrebate, jusqu’alors allié des Romains. Mais César le dit lui-même : ni l’amitié, ni le souvenir des bienfaits ne purent l’empêcher de servir sa patrie. L’amour de l’indépendance, et le désir de la recouvrer tout entière, avaient saisi les esprits. Il fallait renoncer à la qualité d’homme libre, ou s’unir avec le plus grand nombre contre les Romains.

Quelque diligence qu’on fit, ces troupes ne purent marcher au secours d’Alesia, au temps marqué par Vercingetorix. Ce délai jeta le désespoir dans l’âme des assiégés, qui, ne sachant pas ce qui se décidait en leur faveur et manquant déjà de vivres, délibéraient sur les partis les plus violens. On résolut de faire sortir toutes les