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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/274

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les endroits convenables à l’emplacement des machines. »

Telle est la reproduction fidèle de ce passage des Commentaires, manqué par tous les traducteurs.

Mais déjà les accidens du siége commençaient à changer de face. Les Romains, à couvert dans leur citadelle, se trouvèrent en état de protéger les grands travaux de la terrasse, et ils dominaient pleinement sur la tour de la ville qui les écrasait auparavant. Ce dernier avantage procura encore aux assiégeans les moyens de protéger la construction d’une galerie pour l’approche du bélier.

César l’appelle musculus, et lui donne soixante pieds de longueur. Elle était composée de deux pièces de bois, avec des montans et un toit recouvert de briques maçonnées. Par-dessus on mit encore des cuirs pour empêcher l’eau de tremper le mortier ; le tout fut garanti par des matelassons. Cet ouvrage fini sous la protection de la tour, et à la faveur des mantelets, on le roula sur de grands cylindres dont les anciens faisaient usage pour tirer leurs vaisseaux à terre ou pour les lancer à l’eau.

Le trajet que cette lourde masse avait à faire pour arriver à la tour de la ville qui était opposée, ne se trouva pas grand, vu sa longueur de soixante pieds. On couvrit d’ailleurs soigneusement les manœuvres, et l’on parvint ainsi à établir une communication couverte depuis la tour de briques jusqu’au mur des assiégés.

La soudaine apparition de cette machine effraya les Massiliens. Ils craignirent avec raison qu’elle n’engendrât tout l’appareil nécessaire pour renverser leurs murailles. Ils firent rouler du haut des remparts, de grosses pierres et d’autres masses dont la pesanteur, augmentée par l’impulsion, aurait ruiné les mantelets ordinaires ; mais la galerie était à l’épreuve des fardeaux les plus pesans.

Ils eurent recours aux feux d’artifice, et lancèrent des barils enflammés remplis de poix noire, de résine et de soufre. Ce fut encore sans effet ; car, tombant sur le comble, ils roulaient de droite et de gauche, et les soldats les éloignaient avec des fourches.

Tant d’efforts inutiles de la part des assiégés devaient épuiser à la longue leurs moyens de défense, et donner aux assiégeans, toute la sécurité possible, pour fracasser le mur. Les Romains employèrent de gros béliers pointus connus sous le nom de tarrières, et l’on arracha les grandes pierres avec le corbeau démolisseur.

Les Massiliens découragés regardèrent le sac de la ville comme inévitable, et résolurent de tenter un accommodement. Ils sortirent en grand nombre sans armes, la tête ceinte de bandeaux blancs en signe de paix, et ils supplièrent le général romain de leur accorder une trêve jusqu’à l’arrivée de César, promettant de se rendre à lui.

Trebonius avait reçu l’ordre d’épargner la ville, et surtout d’éviter l’assaut. Il se laissa donc aisément fléchir, malgré les murmures du soldat, que l’espérance du pillage aidait à supporter patiemment la fatigue.

La trêve était conclue. On détacha peu de monde pour la garde des ouvrages. Trebonius paraissait sans défiance ; les armes des légionnaires restaient couvertes ; on n’attendait rien moins qu’une perfidie de la part des vaincus. Cependant quelques jours s’étaient à peine écoulés, que les Massiliens résolurent de mettre à profit une pareille incurie, et, choisissant l’heure