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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/303

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d’Antoine, qui parut à la tête de douze cohortes, la déroute eût été complète.

L’alarme portée jusqu’à César par des feux allumés sur la hauteur le fit accourir à cet endroit. Il prit autant de cohortes qu’il put en trouver sur sa route ; mais il arriva trop tard. Pompée avait déjà forcé les défenses, et brusquement sorti de sa position gênante, il commençait à asseoir son camp sur un terrain libre. Là, sans perdre sa communication avec la mer, il était à portée de se pourvoir facilement d’eau et de fourrages ; ressources précieuses, dont son armée avait un extrême besoin.

Loin de recueillir le fruit qu’il semblait attendre d’un travail de plusieurs mois, César se trouva exposé au reproche d’avoir enfanté des projets chimériques, et d’employer témérairement, vis-à-vis du plus grand capitaine du siècle, des artifices qui ne pouvaient réussir que contre des barbares, ou arrêter tout au plus des généraux de médiocre capacité.

Cependant il ne parut pas que cet événement eut fait sur César une impression profonde, ni que la confiance de ses troupes en fut diminuée. Il se présenta de nouveau à l’ennemi, qui venait de changer de position, et dressa ses tentes, toujours déterminé à continuer sur le même plan ses opérations offensives. Il s’ensuivit une action dont le résultat devient évident, quoique le texte des Commentaires soit trop défectueux pour en constater facilement le détail.

On voit que les deux armées avaient déjà changé remplacement choisi après la dernière action ; que Pompée s’était emparé des fortifications abandonnées par son adversaire, mais avec la précaution d’y joindre un second retranchement, afin d’embrasser un terrain plus vaste nécessaire à une armée nombreuse. Ce camp était couvert d’un côté par un bois, et s’appuyait de l’autre sur une rivière.

Dans cette position, Pompée avait tiré une ligne qui communiquait au fleuve, pour s’assurer le libre accès de l’eau ; toutefois, après cette précaution, il ne jugea pas à propos de rester où il s’était établi, et se mit en marche. Il avait déjà parcouru environ la moitié d’un mille, lorsqu’il s’avisa, sans qu’il soit dit pourquoi, de renvoyer une légion reprendre possession du camp qu’il venait de quitter.

César, sur ces entrefaites, fortifiait son nouveau poste. Il n’eut pas plus tôt reconnu la destination de ce détachement, qu’il crut pouvoir saisir cette occasion de recouvrer ce que la dernière action lui avait fait perdre de sa gloire ; il donna ordre de continuer les travaux afin d’amuser l’ennemi, tandis que lui-même, à la tête de vingt-trois cohortes en deux divisions, marcha le long du bois qui le cachait, et s’avança jusqu’à ce camp délaissé qu’il s’agissait de reprendre.

Il s’y jeta brusquement, et rencontra l’ennemi déjà en possession des lignes extérieures. Il le chargea jusque dans l’intérieur des retranchemens, où il en fit un grand carnage ; mais la seconde division qui devait attaquer sur des points différens, prit pour les fortifications du camp la ligne de communication qui couvrait les approches de la rivière, et, avant de reconnaître son erreur, parcourra une grande étendue de cette ligne.

Enfin, on remarqua qu’elle n’était point défendue. L’infanterie la passa d’abord, et fut bientôt suivie de toute la cavalerie ; mais la durée de la première méprise laissa le temps nécessaire à Pompée pour venir au secours de ses troupes.