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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/336

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goths, et enfin les Lombards, peuples dont la domination allait peser sur l’Italie.

Malgré les désordres causés par la tyrannie et l’abrutissement de plusieurs empereurs ; malgré la licence effrénée des soldats accoutumés à se donner des maîtres et à les détruire, les légions s’étaient soutenues jusqu’à Constantin. Après lui, l’empire se partagea de nouveau : alors, pressés sur tous les points par les Barbares, les empereurs crurent se mettre en sûreté en se faisant un appui des uns contre les autres.

C’est ainsi que Valens admit les Visigoths dans l’intérieur de l’empire, par la plus mauvaise de toutes les raisons, ce qui arrive quelquefois dans les conseils. Ces Barbares, disait-on, sont guerriers ; ils deviendront propres à la milice, et chaque province pourra payer le prix des hommes qu’on lui laissera. C’est Ammien Marcellin qui nous dévoile cette admirable politique. Peut-être aussi se flattait-on que les Visigoths seraient ennemis irréconciliables de ces Asiatiques qui étaient venus fondre sur eux en Europe, et les déposséder de leurs pâturages.

En permettant aux Visigoths d’entrer dans l’empire, le conseil exigeait qu’ils livrassent leurs enfans pour être élevés dans l’Asie Mineure. La disette, la terreur, la nécessité de mettre le Danube entre eux et leurs ennemis, forcèrent les Visigoths de consentir à des propositions si dures. Plus tard, ces peuples, vexés par les gouverneurs, se révoltèrent, s’unirent aux Huns, aux Alains, à d’autres Barbares ; il se donna une grande bataille, que Valens perdit avec la vie.

Si le conseil impérial de Constantinople avait eu l’énergie du sénat de Rome, il envoyait des ambassadeurs aux Hiong-nou, pour leur enjoindre de ne point attaquer une nation protégée par les Romains ; et, en cas de résistance, il ne trouvait pas plus de difficulté à subjuguer ces Barbares, que les généraux chinois n’en rencontrèrent pour les vaincre. Les Visigoths secourus auraient respecté les Romains.

En Occident, Valentinien Ier fit la même faute ; il se servit des Saxons et des Bourguignons pour repousser les Allemands. Cette mauvaise politique s’était établie ; on donnait des subsides aux peuples qu’on employait ; souvent même il fallait les leur continuer après la guerre pour empêcher les révoltes. Ces considérations déterminèrent les empereurs à les prendre désormais à leur solde, et ils diminuèrent le nombre des troupes provinciales.

Lorsque Théodose voulut venger la mort de Valentinien II, son armée était presque toute composée d’auxiliaires d’Arménie et d’Ibérie, de Sarrasins, de Goths, et autres Barbares. L’empire se trouva encore réuni dans les mains d’un seul homme ; mais ce fut pour la dernière fois.

Cet empire s’étendait alors de l’Euphrate aux mers de l’Islande ; du Rhin et du Danube au Sénégal, et aux montagnes de l’Éthiopie. Il subsistai depuis plus de quatre cents années, tenait sous le même joug ces peuples policés dont l’antiquité se vante ; il renfermait les villes les plus riches et les plus magnifiques qu’on ait jamais vues. Cependant tous les vices propres à détruire un état minaient sourdement ce colosse.

Les Barbares, admis au centre des plus belles provinces, y vivaient sous leurs tentes, les armes à la main. Les grandes dignités étaient occupées par des étrangers ; de vils eunuques élevaient les enfans de l’empereur, et dominaient encore l’intérieur du palais.