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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/422

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POLYBE, LIV. II.

tique ayant appris que les Gaulois s’étaient jetés dans la Tyrrhénie, et qu’ils approchaient de Rome, vint en diligence au secours de sa patrie, et arriva fort à propos. S’étant campé proche des ennemis, les fuyards virent les feux de dessus leur hauteur, et, se doutant bien de ce que c’était, ils reprirent courage. Ils envoient au plus vite quelques‑uns des leurs sans armes pendant la nuit et à travers une forêt, pour annoncer au consul ce qui leur était arrivé. Émilius, sans perdre de temps à délibérer, commande aux tribuns, dès que le jour commencerait à paraître, de se mettre en marche avec l’infanterie ; lui‑même se met à la tête de la cavalerie, et marche droit vers la hauteur. Les chefs des Gaulois avaient aussi vu les feux pendant la nuit, et, conjecturant que les ennemis étaient proches, ils tinrent conseil. Anéroeste leur roi dit qu’après avoir fait un si riche butin (car ce butin était immense en prisonniers, en bestiaux et en bagages), il n’était pas à propos de s’exposer à un nouveau combat, ni de courir le risque de perdre tout ; qu’il valait mieux pour eux retourner dans leur patrie ; qu’après s’y être déchargés de leur butin, ils seraient plus en état, si on le trouvait bon, de reprendre les armes contre les Romains. Tous se rangeant à cet avis, avant le jour ils lèvent le camp, et prennent leur route le long de la mer, par la Tyrrhénie. Quoique Lucius eût réuni à ses troupes celles qui s’étaient réfugiées sur la hauteur, il ne crut pas pour cela qu’il fût de la prudence de hasarder une bataille rangée ; il prit le parti de suivre les ennemis, et d’observer les temps et les lieux où il pourrait les incommoder et regagner le butin.




CHAPITRE VI.


Bataille et victoire des Romains contre les Gaulois proche de Télamon.


Le hasard voulut que dans ce temps-là même Caïus Atilius, venant de Sardaigne, débarquât ses légions à Pise, et les conduisît à Rome par une route contraire à celle des Gaulois. À Télamon, ville des Tyrrhéniens, quelques fourrageurs gaulois étant tombés sur l’avant‑garde du consul, les Romains s’en saisirent. Interrogés par Atilius, ils racontèrent tout ce qui s’était passé, qu’il y avait dans le voisinage deux armées et que celle des Gaulois était fort proche, ayant en queue celle d’Émilius. Le consul fut touché de l’échec que son collègue avait souffert ; mais il fut charmé d’avoir surpris les Gaulois dans leur marche, et de les voir entre deux armées. Sur‑le‑champ il commande aux tribuns de ranger les légions en bataille, de donner à leur front l’étendue que les lieux permettraient, et d’aller militairement au-devant de l’ennemi. Sur le chemin il y avait une hauteur au pied de laquelle il fallait que les Gaulois passassent : Atilius y courut avec la cavalerie, et se logea sur le sommet, dans le dessein de commencer le premier le combat, persuadé que par là il aurait la meilleure part à la gloire de l’événement. Les Gaulois, qui croyaient Atilius bien loin, voyant cette hauteur occupée par les Romains, ne soupçonnèrent rien autre chose, sinon que pendant la nuit Émilius avait battu la campagne avec sa cavalerie pour s’emparer le premier des postes avantageux. Sur cela ils détachèrent aussi la leur et quelques soldats armés à la légère, pour chasser les Romains de la hauteur. Mais ayant su d’un prisonnier que c’était Atilius qui l’occupait, ils mettent au plus vite l’in-