Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/427

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
419
POLYBE, LIV. II.

de leurs actions, mais généralement dans tout ce qu’ils entreprennent, suivent plutôt leur impétuosité qu’ils ne consultent les règles de la raison et de la prudence. Aussi furent‑ils chassés de tous les environs du Pô, à quelques endroits près qui sont au pied des Alpes ; et cet événement m’a fait croire qu’il ne fallait pas laisser dans l’oubli leur première irruption, les faits qui se sont passés depuis, et leur dernière défaite.

Ces jeux de la fortune sont du ressort de l’histoire, et il est bon de les transmettre à nos descendans, pour leur apprendre à ne pas craindre les incursions subites et irrégulières des Barbares. Ils verront par là qu’elles durent peu, et qu’il est aisé de se défaire de ces sortes d’ennemis, pourvu qu’on leur tienne tête, et que l’on mette plutôt tout en œuvre, que de leur rien céder de ce qui nous appartient. Je suis persuadé que ceux qui nous ont laissé l’histoire de l’irruption des Perses dans la Grèce et des Gaulois à Delphes, ont beaucoup contribué au succès des combats que les Grecs ont soutenus pour maintenir leur liberté ; car lorsqu’on se représente les choses extraordinaires qui se firent alors, et la multitude innombrable d’hommes qui, malgré leur valeur et leur formidable appareil de guerre, furent vaincus par des troupes qui surent dans les combats leur opposer la résolution, l’adresse et l’intelligence : il n’y a plus de magasins, plus d’arsenaux, plus d’armée qui épouvante ou qui fasse perdre l’espérance de pouvoir défendre son pays et sa patrie. Or, comme les Gaulois n’ont pas seulement autrefois jeté la terreur dans la Grèce, mais que cela est encore arrivé plusieurs fois de nos jours, de là une nouvelle raison pour moi de reprendre de plus haut, et de rapporter en abrégé les principaux points de leur histoire. Revenons maintenant à celle des Carthaginois.




CHAPITRE VII.


Annibal succède à Asdrubal. — Abrégé de l’histoire des Achéens. — Pourquoi les peuples du Péloponnèse prirent le nom des Achéens. — La forme de leur gouvernement rétablie dans la Grande-Grèce. — Ils réconcilient les Lacédémoniens avec les Thébains.


Asdrubal avait gouverné l’Espagne pendant huit ans, et, par la douceur et la politesse dont il usa envers les puissances du pays, plus que par les armes, il avait fort étendu la puissance de sa république, lorsqu’une nuit il fut égorgé dans sa tente par un Gaulois qui voulait se venger de quelques injustices que ce général lui avait faites. Annibal, quoique jeune, avait donné tant de preuves de son esprit et de son courage, que les Carthaginois le jugèrent digne de succéder à Asdrubal. Il n’eut pas été plus tôt élevé à cette dignité, qu’à ses démarches il fut aisé de voir qu’il ne manquerait pas de faite la guerre aux Romains : il la leur fit en effet peu de temps après. Dès lors les Carthaginois et les Romains commencèrent à se suspecter les uns les autres, et à se chercher querelle : ceux‑là n’épiant que les occasions de se venger des pertes qu’ils avaient faites en Sicile, ceux‑ci se tenant en garde contre les mesures qu’ils voyaient prendre aux autres ; dispositions, des deux côtés, qui marquaient clairement que la guerre ne tarderait pas à s’allumer entre ces deux états.

Jusques ici nous avons rapporté de suite les affaires qui se sont passées en Sicile et en Afrique, et les événemens qu’elles ont produits. Nous voici enfin arrivés au temps où les Achéens, le roi Philippe et d’autres alliés entreprirent

27.