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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/524

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POLYBE, LIV. IV.

part de son camp avec ses Achéens, et se met en bataille dans la plaine de Caphyes, se couvrant de la rivière qui la traverse. Comme, outre la rivière, il y avait encore plusieurs fossés difficiles à franchir pour aller aux Achéens, les Étoliens, n’osant pas suivre leur premier projet et les attaquer, marchèrent en bon ordre vers les hauteurs qui les conduisaient à Oligyrte, croyant assez faire que d’empêcher qu’on ne les obligeât de combattre.

Déjà l’avant‑garde montait les hauteurs, et la cavalerie qui faisait l’arrière‑garde, traversant la plaine, était presque arrivée au pied de la montagne appelée Propous, lorsqu’Aratus détacha sa cavalerie et les soldats armés à la légère sous le commandement d’Épistrate, Acarnanien, avec ordre d’insulter l’arrière‑garde et de tenter un peu les ennemis. Cependant, s’il avait dessein d’engager un combat, il ne fallait ni fondre sur l’arrière‑garde ni attendre que l’armée ennemie eût traversé toute la plaine ; c’était l’avant‑garde qu’il fallait charger lorsqu’elle y fut entrée : de cette manière le combat se serait livré sur un terrain plat et uni, où les Étoliens qui n’étaient ni armés ni exercés pour combattre en rangs et en files, n’auraient pu soutenir l’attaque des Achéens accoutumés à l’ordre en phalange, et qui avaient encore sur eux l’avantage des armes ; au lieu que, n’ayant su profiter ni du terrain ni de l’occasion, ils attaquèrent l’ennemi lorsque tout lui était plus favorable.

Aussi le succès du combat répondit‑il au projet qu’on en avait formé. Lorsque la cavalerie étolienne vit cette troupe à sa portée, elle n’en continua pas moins son chemin en bon ordre, afin de gagner le pied de la montagne où était son infanterie. Aratus aussitôt, sans voir pourquoi la cavalerie se pressait d’avancer, sans prévoir ce qui allait arriver, crut qu’elle prenait la fuite et ordonna aux soldats des ailes de se détacher de la phalange pour appuyer les troupes légères ; lui‑même, il suivit en toute hâte avec la phalange, faisant faire à droite et marcher par le flanc. La cavalerie étolienne ayant traversé la plaine et atteint l’infanterie, monta un peu la pente au‑dessus du pied de la montagne et s’y posta : l’infanterie se rassemble à sa droite et à sa gauche, criant à ceux qui étaient encore en marche d’accourir à leur secours. Quand ils se crurent en assez grand nombre, ils fondirent serrés sur les premiers rangs de la cavalerie achéenne et les soldats des armés à la légère ; et quand leur nombre se fut augmenté, ils fondirent d’en haut sur les Achéens : le combat fut long-temps opiniâtre, mais enfin les Achéens furent mis en fuite, et les soldats pesamment armés qui venaient à leurs secours, dispersés et sans ordre, ne sachant ce qui s’était passé pendant le combat, ou tombant au milieu de ceux qui fuyaient, furent entraînés par eux ; ce qui fit que cinq cents hommes seulement en vinrent aux mains avec l’ennemi, et qu’il y en eut plus de deux mille qui prirent la fuite.

Les Étoliens firent alors ce que la conjoncture les avertissait de faire ; ils se mirent à la poursuite des Achéens avec des cris dont toute la plaine retentissait. Ceux‑ci se retirèrent vers le corps de leur armée, et tant qu’ils espérèrent de le trouver encore dans l’avantage de son poste : leur fuite se fit en assez bon ordre, et de manière à pouvoir être protégée ; mais voyant que la phalange avait quitté sa première position, et qu’elle était en marche sur une longue colonne, les rangs et les files confondus, une partie se débanda