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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/547

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POLYBE, LIV. IV.

voudraient. Les ambassadeurs ne trouvèrent pas d’abord Ptolémée disposé à relâcher Andromaque, de la détention duquel il espérait faire un jour bon usage. Il lui restait encore quelques différends à vider avec Antiochus, et avec Achée qui, s’étant depuis peu fait appeler roi, pouvait décider en maître de certaines choses importantes ; car cet Andromaque, outre qu’il était père d’Achée, était encore frère de Laodicée femme de Seleucus. Néanmoins son penchant pour les Rhodiens, et le désir qu’il avait de les favoriser en tout, l’emporta sur toute autre considération. Il leur permit de prendre Andromaque, et de le remettre entre les mains d’Achée son fils. Ils le remirent aussitôt, et décernèrent outre cela quelques honneurs à Achée, et par là ruinèrent entièrement toutes les espérances des Byzantins. Ce ne fut pas le seul malheur qui leur arriva. Tibitès mourut dans le voyage de Macédoine à Byzance. Cette mort rompit encore toutes leurs mesures, et leur fit perdre toute espérance. Ces revers de fortune inspirèrent une nouvelle ardeur à Prusias. Pendant qu’il pressait les Byzantins du côté de l’Asie, les Thraces qu’il avait pris à sa solde les serraient tellement du côté de l’Europe, qu’ils n’osaient sortir de leurs portes : de sorte que, n’ayant plus rien à espérer, ils ne cherchaient plus qu’un honnête prétexte de sortir de cette guerre.

Sur ces entrefaites Cavarus, roi des Gaulois, vint à Byzance ; et, souhaitant que cette guerre fût terminée, il employa sa médiation avec tant de zèle, qu’enfin Prusias et les Byzantins consentirent à un accommodement. Au premier avis que les Rhodiens en reçurent pour conduire leur projet à sa fin, ils députèrent Aridicès vers les Byzantins, et le firent accompagner par Polémoclès avec trois galères, comme pour présenter aux Byzantins la guerre ou la paix. À leur arrivée la paix se conclut, Cothon, fils de Calligiton, étant alors grand‑prêtre à Byzance. Le traité avec les Rhodiens portait simplement « que les Byzantins n’exigeraient aucun tribut de ceux qui navigueraient dans le Pont, et que, moyennant cela, les Rhodiens vivraient avec eux en paix. »

Le traité avec Prusias portait, « que dorénavant il y aurait paix et amitié perpétuelle entre Prusias et les Byzantins ; que Prusias n’exercerait aucunes sortes d’hostilités contre les Byzantins, ni ceux‑ci contre Prusias ; que ce roi rendrait aux Byzantins, sans rançon, toutes leurs terres, ainsi que les forteresses, les peuples et les prisonniers qu’il avait pris sur eux ; et outre cela, les vaisseaux qu’il leur avait gagnés au commencement de la guerre, tout ce qu’il y avait d’armes dans les forts qu’il avait emportés, et le bois, le marbre et la tuile qu’il avait enlevés du lieu sacré, lorsque, craignant l’arrivée de Tibitès, il avait pris des forteresses tout ce qui lui paraissait bon à quelque chose ; qu’enfin Prusias serait obligé de faire rendre aux laboureurs de Mysie, pays de leur domination, tout ce que les Bithyniens leur avaient pris. » Ainsi commença, ainsi finit la guerre entre Prusias et les Byzantins.

Vers le même temps les Cnossiens firent demander par des ambassadeurs aux Rhodiens les vaisseaux qu’avait Polémoclès, en les priant d’y joindre trois vaisseaux qui ne fussent point armés en guerre. Les Rhodiens les leur accordèrent. Quand ces vaisseaux furent arrivés à l’île de Crète, les Éleuthernéens conçurent des soupçons, parce que Polémoclès avait fait mourir